Aragon : l’envers du décor

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Ça faisait des années que je passais devant ce panneau d’autoroute qui indiquait la maison d’Aragon et d’Elsa. J’ai proposé un jour à Martine que nous allions la visiter.

Je dois préciser, sans entrer dans les détails, que je ne suis pas un grand érudit. J’ai une vie et un métier prenant, cela m’a fait passer certaines priorités en les mettant de coté, ce que je regrette aujourd’hui.

Donc, aujourd’hui, ayant la chance de partager ma vie avec une érudite, j’essaie de me rattraper.
Nous voici devant un mur de clôture banal, rien n’indiquant ce qui pouvait bien se cacher derrière.

La porte s’ouvre sur une cour. Petite maison en « L » avec une cour pavée, un puits, un jardinet et deux bancs. A gauche s’ouvre un très grand parc.
Nous entrons et sommes accueillis cordialement, le miracle de la carte de presse.

Je sens tout de suite si Martine est bien ou pas, ça se voit à ses yeux apaisés ou paniqués. Là, elle était apaisée, bien, heureuse.
Un brave jeune homme nous sert de guide, j’avoue que j’ai un peu décroché de son laïus dont il était si fier. J’aime les gens qui vivent pas qui récitent.

Nous entrons dans la cuisine, surprenante, simple sauf si on regarde la vaisselle. Des Picasso en dessous de plats, assiettes etc.…
Ensuite vient le bureau du Maître, encombré de livres, d’affiches. Le bureau est dans un fouillis organisé. A croire qu’Aragon va jaillir d’une porte. Martine écoute le guide, essaie de le flatter un peu pour qu’il sorte de son discours.
La pièce principale, à droite une grande table de ferme pouvant accueillir au moins une dizaine de convives. Imaginez, Aragon, Elsa, Picasso, Breton et les autres ça a du fourmiller d’idées dans ce lieu.
Notre jeune guide parle du sale caractère d’Aragon. Dans cette pièce, il y a la roue à aube du moulin, enfermée dans une sorte de véranda. Quand ses hôtes n’étaient pas d’accord avec lui, le Maître mettait la roue en route si bien que le bruit masquait les conversations, une sorte ce censure…
En écoutant ça je trébuche dans les pieds d’un fauteuil. Ce pied est une corne de taureau du plus mauvais gout. Personne ne m’a vu, rien de cassé, ouf !!

Nous montons à l’étage, l’impression qu’ici commence l’univers d’Elsa. D’abord beaucoup de livre russes. Et puis ça se sent, je ne l’explique pas ça.
La cravate d’Aragon sur une bibliothèque, la chambre d’Elsa et son bureau dont la vue donnait sur le lieu où elle souhaitait reposer (la photo de l’article de Martine donne la vue inverse, de la tombe vers le bureau).
C’est d’une de ces fenêtres qu’Aragon a vu Elsa mourir sous ses yeux, tombant dans le petit jardinet. Un moment d’émotion. Voir ainsi l’amour de sa vie le quitter…

La salle de bain, avec un détail: un fauteuil bien confortable installé à coté de la baignoire ! Même dans son bain, elle ne pouvait être tranquille !

Et toujours cette impression forte que le petit guide n’est pas seul à nous accompagner dans cette visite.

Il nous laisse pour visiter le parc, espace dédié à une exposition d’art moderne qui me laisse un peu indifférent. Martine et moi montons vers la sépulture de nos hôtes. Un grand moment d’émotion, nous entendons le violoncelle, une pierre simple est là.
Nous nous regardons, nous remplissant de ce moment. On les envie ou pas ? Finalement non, nous, nous sommes immortels !

Alain

Une Réponse à “Aragon : l’envers du décor”

  1. perceneiges dit :

    Ce que j’aime, c’est de lire l’article écrit par votre femme, puis le vôtre. Ce sont deux regards différents, mais on sent une sensibilité très proche et beaucoup d’amour entre vous. On sent une grande douceur chez elle, beaucoup de réceptivité. Et chez vous une sensibilité forte pour un homme. Qui en plus a le courage de l’écrire. J’attends les autres envers du décor sur les autres articles.

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