Archive pour le 24 mars, 2009

Mon chien ne sait pas qu’il est un chien…

24 mars, 2009

Je ne suis pas partie seule de Suisse.
J’ai emmené dans mes bagages Scotty Bernier Ière du Nom, ma chienne Scottish Terrier de neuf ou dix ans.
Pas sûre de l’âge, non: les « éleveurs » (qui n’en méritaient d’ailleurs pas le nom!!) me l’ont vendue pour plus jeune qu’elle n’était, m’a appris un jour le vétérinaire.

Bref.
Entre autres qualités, Scotty semble ignorer qu’elle est un chien.
Je le pressentais déjà par le passé, j’en ai eu la preuve depuis que je suis en Bretagne.
Cette bestiole aux poils noirs parsemés de blanc et à la bouille de dessin animé, a des attitudes de jeune demoiselle enamourée dès qu’Alain rentre.

Elle a toujours adoré les hommes.
Je sais que son maître lui manque et que, quand elle va le revoir en avril, elle n’aura qu’un désir: repartir avec lui.
Les femmes, dont je fais partie, représentent pour elle un deuxième choix, à ne fréquenter qu’en cas d’absolue nécessité.

Donc, dès son premier contact avec Alain, elle a compris que s’il y avait quelqu’un à séduire dans la maison, c’était lui.
Pour de multiples raisons.
La première étant que, craquant devant cette demi-portion qui lui fait des papouilles dès qu’il apparaît, il est prêt à la récompenser en la laissant ingurgiter n’importe quelle denrée plus ou moins alimentaire lui tombant sous la main.
Or, Scotty, en chien bien élevé, n’a droit qu’à la nourriture qui lui est destinée. Chacun sachant que les restes de table fragilisent la santé des chiens.

Dès le premier soir, à l’hôtel, j’ai installé le panier de Madame dans un coin, en lui expliquant que rien n’a changé: elle dort dans son panier, et pas dans les lits.
Elle n’a d’ailleurs pas le droit de mettre le bout des moustaches dans la chambre, mais bon… cas de force majeure oblige..

Au petit matin, (mais alors vraiment très petit matin), j’ouvre un oeil, réveillée par un petit remue-ménage à ma droite, où se trouvait Alain.
Alors que je me redresse dans la pénombre, j’entends un bruit très caractéristique.
Du genre métronome devenu fou, tapant une cadence insensée sur le duvet du lit.
Qu’est-ce, me direz-vous?
La queue de Scotty, au bout de laquelle je découvre mon chien parfaitement ravi et honteux à la fois, très consciente qu’elle se trouve dans une position qui va lui valoir une monstrueuse réprimande.
Elle adresse un sourire complice à Alain (Si!!! mon chien sourit!!!) et avance vers lui en rampant, oreilles en bas, très conquérante sous ses airs faussement soumis.
Et bien entendu… il craque.

La vie s’installe petit à petit.
Mon mini chien à l’allure de colonel à la retraite, moustache au vent, découvre son nouveau domaine.
Elle me fait comprendre qu’elle a horreur du chauffage au sol en s’étalant de tout son long, pattes écartées, et en haletant vigoureusement.
Message reçu: le chauffage est arrêté.
Une fois les meubles installés, elle visite, restant au rez-de-chaussée par crainte de l’escalier en bois, un peu glissant pour ses mini pattes.

Petit à petit, elle prend ses aises, sait où se trouve son sac de nourriture, repère où sont les os et les friandises.
Devant les supplications d’Alain qui manque de s’évanouir à chaque fois qu’il respire l’haleine de la bête, j’achète des os destinés à améliorer cette situation.
D’un air dégoûté, elle les mâchouille à contre-coeur, venant se planter devant nous dès qu’elle nous voit passer à table.
Alain résiste, moi aussi.

Dès que mon grand homme rentre à la maison, elle se précipite pour lui exprimer son euphorie, ce que lui, homme à chats, reçoit avec la bonhomie tendre d’un rajah bien éduqué.
Un soir de la semaine dernière, heureuse de le retrouver, je savourais les instants de paix que nous partagions enfin, dans le canapé du salon.
Blottie contre lui, je sentais son bras autour de moi… quand soudain, j’ai vu une tête à vingt centimètres de la mienne.
Une tête poilue, une truffe noire, surmontée d’un regard béat.
Scotty!!!
Elle avait fait exactement la même chose que moi, se vautrant dans le canapé de l’autre côté de MON homme, posant sa tête sur sa poitrine.
Et lui, hilare, l’enlaçait comme il le faisait pour moi.
Non, n’imaginez pas la scène, c’est parfaitement ridicule!
Mais rigolo…

Mon chien ne sait donc pas qu’il est un chien.

En revanche, elle a un sens certain de la propriété.
Et pas seulement avec Alain.
Hier matin, alors que le jour n’était pas encore levé, je travaillais dans mon bureau donnant sur le jardin lorsque Scott a aboyé.
Le fait est suffisamment rare pour qu’il m’alerte.
J’ai regardé ce qui l’agaçait.
Une ombre se déplaçait souplement dans le jardin.
Je me suis approchée, toujours aussi myope, et j’ai vu un labrador chocolat qui arpentait ce que j’appelle pompeusement ma pelouse (mais qui est en fait un grand espace herbeux…).
Profitant de l’absence momentanée du portail, le cornichon reniflait voluptueusement et ne s’est pas gêné pour baptiser le jardin.
Or, personne d’autre que Scotty n’a le droit de faire là ce qu’il venait de faire. D’autant que je passe systématiquement derrière elle pour recueillir ses offrandes.

Outrée, Scott a été furieuse toute la matinée.
Les copains chiens, elle aime bien.
Mais de là à les voir arriver sans carton d’invitation, quand même!!!

Martine Bernier