Archive pour avril, 2009

Mince… demain, j’ai 50 ans!

10 avril, 2009

Demain 11 avril, il y a peu de chances pour que j’écrive sur Ecriplume. Pourquoi? Parce que demain, j’aurai 50 ans. Mince… Lorsque j’étais enfant, les gens de cet âge me semblaient survivants du paléolithique. De très, trrrrrèèès vieilles personnes…

Allez savoir pourquoi, j’ai revu mon jugement depuis. Bien que je sache que je suis proche de la date de péremption, je n’arrive pas à me considérer comme mûre, voire blette. Evidemment, je n’ai plus la souplesse et la ligne de mes 20 ans. Mais j’ai toujours des rêves et des projets plein la tête, l’envie de dévorer la vie avec celui que j’aime.

Il sait d’ailleurs quel cadeau d’anniversaire j’aimerais qu’il me fasse…

En ce moment, je passe quelques jours avec mon amie Janick. Et demain, très tôt, Eric, l’homme avec lequel j’ai partagé ma vie durant 16 ans, sera là. Il effectue le voyage juste pour passer ma journée d’anniversaire avec moi, sachant qu’Alain ne sera pas là et que cela me rend triste. Un homme de coeur et de bien…

Pour le recevoir dignement, j’ai mis un point d’honneur à briquer le navire. La maison reluit et sent bon… Mais, alors que, vers 22 heures, Janick et moi regagnions nos quartiers pour la nuit, j’ai vu, ô horreur, que de la poussière perfide s’était nichée tout le long de l’escalier en bois. Nous nous sommes retrouvées toutes les deux assises sur les marches, à frotter le bois avec un enthousiasme frénétique. Jusqu’au moment où, prenant conscience de ce que nous faisions, j’ai éclaté de rire. Elle m’a emboîté le pas et le fou rire a duré un moment.

Bon, d’accord, j’ai 50 ans… mais pourquoi diable ai-je l’impression d’être aussi disjonctée qu’à 20 ou 30 ans?? J’ai comme l’impression que mon cas est désespéré…

 

Martine Bernier

Georges Lautner:un Monsieur…

10 avril, 2009

Pour le livre que j’écris en ce moment, il était nécessaire que j’arrive à obtenir une petite interview du cinéaste Geroges Lautner, l’homme à qui nous devons notamment le film cultissime « Les Tontons Flingueurs ».

Je suis entrée en contact avec son assistante, et mardi dernier, j’ai téléphoné au numéro qui m’a été donné.

Dès le départ, le contacts s’est instauré: nous avons les mêmes attaches et les mêmes amitiés dans la station suisse des Diablerets… Puis je lui ai posé des questions sur ces acteurs qui nous ont fait rire ou rêver: Lino Ventura, Bernard Blier, Mireille Darc, Paul Meurisse et tant d’autres… Il m’a parlé de sa vie, du bonheur de tourner, de ses films, de ces acteurs qu’il aime d’amour et d’amitié, du tournage des « Tontons »….

Nous avons échangé nos coordonnées, avons décidé de rester en contact…

J’ai eu droit à une rencontre magnifique, avec un homme de coeur, généreux et drôle, passionnant.

Et, encore une fois, je me suis dit que j’avais décidément la chance d’exercer un métier merveilleux…

 

Martine Bernier

L’île aux grillades

9 avril, 2009

De passage à Redon (France) avec une amie, nous avons découvert par hasard un restaurant qui nous a complètement séduites: « L’Ile aux Grillades ».
Les propriétaires actuels l’ont racheté il y a une semaine à peine, et reçoivent leurs clients avec une gentillesse qui, à elle seule, vaut le détour.
La cuisine savoureuse, classique mais goûteuse et pas très chère, et le décor composé d’un mobilier moderne aux teintes chaudes dans une maison ancienne pleine de cachet, nous ont laissées une sensation de réussite parfaite.
En bref, si vous passez par là, n’hésitez pas à vous y arrêter, vous serez séduits par la cuisine et la cordialité de tous ceux qui y travaillent!

M.B.

Ile aux Grillades
15 rue de l’Enfer, 35 600 Redon
Tél/fax: 02 99 72 20 40

Escal’ Atlantique

9 avril, 2009

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Depuis avant-hier soir, j’ai la visite de l’une de mes amies très chère, venue passer quelques jours avec moi.

Pour la première fois, j’ai donc pu présenter Alain à quelqu’un de mon cercle intime, et le voir évoluer en sa présence. J’ai été séduite de le voir aussi à l’aise, aussi naturel, disponible et intéressé par nos conversations… Hier matin, alors que la pluie avait pris possession du ciel de Bretagne, il nous a proposé d’aller visiter des sites, au sec.

Et il nous a entraînées à St Nazaire, à la découverte d’Escal’Atlantique, qu’il connaissait déjà.

La surprise… 

Imaginez un paquebot amaré dans l’ancienne base de sous-marins. C’est Escal’ Atlantique. Vous embarquez, êtes reçus par un équipage stylé, et partez pour une croisière à travers le temps, découvrant ces paquebots prestigieux qui effectuaient les traversées transatlantiques. La reconstitution est saisissante, la visite jalonnée de surprises. Et Alain était le véritable capitaine de ce vaisseau magique qu’il a pris un plaisir visible à nous faire explorer…

Nous avons adoré…

Si vous passez par St Nazaire, n’hésitez pas et emmenez vos enfants: ils seront, comme vous, enchantés!

M.B.

http://www.saint-nazaire-tourisme.com/index.php?Ids=kWwUSAvbzoNAcgXhROAp&Menu=Mcpid&Action=777&DIdn1=&DIdn2=&DIdn3=&OIdn1=&OIdn2=&Idn3=&N=&idn3=71&ide=1&dr1=2&dr2=16

Le paradis des escargots

8 avril, 2009

Une semaine après mon arrivée, j’ai constaté avec horreur que la porte d’entrée de mon adorable maison était couverte de toiles d’araignées et… d’escargots!
J’ai bien dit d’escargots.

Je n’ai pas habité trente ans en Suisse, dans le pays le plus « propre en ordre de la planète » sans avoir retenu quelques leçons d’hygiène élémentaire.
J’ai fait ni une ni deux: j’ai empoigné un seau, du savon, une éponge, et j’ai rendu à la porte sa vocation première.
Porte elle est, porte elle restera.
Fini, le squatt pour gastéropodes!
Non mais!

Pendant que j’oeuvrais, deux dames, qui promenaient leurs chiens, m’ont regardée avec des yeux ronds.
Je leur ai adressé un sourire, la mèche en bataille, et elles m’ont demandé ce que je faisais.
- Heu… je nettoie la porte. Elle était couverte d’escargots.
- Ah bon? Bon courage!

Au bout d’une demi-heure, l’entrée luisait de propreté, et une colonie d’escargots SDF s’éloignait sur la route en traînant ses bagages.

Dans la même journée, j’ai eu la visite de notre propriétaire, venue s’enquérir de notre installation.
Le sujet du jour étant « la porte », elle a eu une réaction aussi surprise que mes interlocutrices précédentes.

- Vous savez, ici, les escargots… on en est infestés. Alors vous aurez beau nettoyer, ils reviendront tout le temps.

Ah oui?
Puisque c’est ainsi, la guerre est déclarée.
Depuis ce jour, à chaque fois que je rentre ou sors de la maison, je jette un regarde suspicieux sur la porte d’entrée.
Jusqu’ici, les escargots, qui se sont donné le mot, n’ont pas fait mine de réapparaître.
Un murmure parcourt le village de coquille en coquille: « Méfiez-vous du bout de l’allée. Y vit une nana complètement folle, qui ne nous apprécie que très modérément. »

Un mois (oui, déjà…) a passé.
Pas de problème: ces mollusques visqueux se tenaient à distance respectueuse, jusqu’à ce matin.
En rentrant, hier soir, j’ai réalisé que, sur l’appui de fenêtre de la cuisine se trouvait un gastéropode dodu.
Visiblement un escargot adolescent, un peu fougueux, venu voir si j’étais à la hauteur de ma réputation.
Je dois lui reconnaître un certain courage, à l’animal.
Il est venu sans arme, et s’est placé à un endroit où il était impossible de ne pas le voir.
Et puis son exploit avait du mérite: pour une bestiole de cette taille, escalader le mur pour atteindre l’appui de fenêtre devait être fatiguant.

Je l’ai donc pris délicatement, et j’ai été le poser sur le muret qui entoure la maison.
D’ici à ce qu’il en redescende, qu’il traverse les quelques mètres le séparant de la maison, qu’il ré-escalade le mur et qu’il réintègre l’appui de fenêtre, il lui faudra bien un autre bon mois.
Cela me donne le temps de réfléchir à la suite de ma stratégie militaire.

Pour le moment:
Martine: 1
Escargot: 0. Mais bien essayé!

Martine Bernier

Pierre Loti : La maison magique

7 avril, 2009

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Hier, j’ai réalisé l’un de mes rêves: visiter la maison de l’écrivain Pierre Loti, à Rochefort, près de la Rochelle, afin de lui consacrer un article.
Nous n’avons pas été déçus: c’est la maison d’écrivain la plus incroyable qu’il m’ait été donné de visiter.

Au départ, c »était une demeure traditionnelle, lieu de naissance de l’auteur de « Pêcheurs d’Islande » et d’une quarantaine d’autres romans.
Mais ce militaire, grand voyageur et orientaliste passionné (il a profondément aimé la Turquie, notamment…), avait une personnalité originale et excentrique, rendue plus intéressante encore par une part d’ombre et de mystère.
Il a eu envie de transformer la maison familiale pour la rendre conforme à son idéal de vie.
Et la maison jusque là classique, qui ne se démarquait pas de celles des voisins, est devenue un palais oriental baroque, avec une salle renaissance dotée d’un escalier spectaculaire, d’une salle gothique, mais aussi et surtout d’une mosquée, d’une salle arabe, d’un salon turque…
Il y a donné, avec son épouse, des fêtes gigantesques, généreuses et excentriques, a séduit les plus grands de l’époque, était très ami avec Sarah Bernard…

Un univers dépaysant et fou, impossible à imaginer depuis la rue.
Mais sa part d’ombre ne l’a pas quitté, tout au long de sa vie.
Marqué par des drames familiaux traumatisants (il a perdu son frère aîné auquel il vouait un culte, puis son père, et une amie…) il intégrera toujours une touche mortifère à son univers.

Avec Alain, nous avons savouré la visite, la prolongeant par l’achat de livres.
Notre guide était conteur de formation. Il avait préparé un texte magnifiquement documenté, entre rêve et réalité. Et il a entraîné les visiteurs dans sa magie avec un réel talent.

De retour à la réception, j’ai choisi les deux tomes du journal de l’auteur et quelques-uns de ses romans.
Le responsable de ce coin bibliothèque était passionnant, cordial et drôle, aussi inattendu que devait l’être le précédent maître des lieux.

En clair: nous avons beaucoup aimé… et je cours écrire mon article!

Martine Bernier

Maison de Pierre Loti
141 Rue Pierre Loti
17300 Rochefort
Tél. 05 46 82 91 90

« Et vous écrivez encore? »

6 avril, 2009

Ce matin, un charmant monsieur qui me fait le cadeau de me lire depuis des années à travers tous les journaux et autres supports pour lesquels je travaille ou ai travaillé, me disait:

- J’adore vous lire sur Ecriplume. Mais je voudrais vous demander: en dehors du blog, écrivez-vous encore maintenant que vous êtes en France? Et si oui, que faites-vous?

Hum. Oui, j’écris encore et toujours.

Les textes d’Ecriplume sont ma mise en bouche matinale. Puis, je passe à d’autres choses. Comme la question m’a été posée, cela vous intéresse-t-il de savoir?

Deux de mes employeurs Suisses m’accordent toujours leur confiance. Je suis donc toujours journaliste dans le sens le plus complet du terme.

Et puis, je travaille actuellement sur un livre qui sortira cet été pour le 40e anniversaire du FIFAD, Festival International du Film Alpin des Diablerets. J’y retrace l’histoire du groupe de montagnards passionnés qui a un jour créé cette manifestation sans savoir qu’elle aurait un jour l’ampleur qui est la sienne aujourd’hui. Les plus grands noms de la montagne et du cinéma l’ont fréquentée.

Dans le cadre de ce livre, je vais cette semaine interviewer par téléphone un homme qui nous a fait cadeau de films formidables, dont le cultissime morceau d’antologie: « Les Tontons Flingueurs ». Interroger Georges Lautner, autant dire que je me réjouis d’avance…

Donc oui, j’écris encore. Et lorsque j’aurai terminé l’ouvrage en cours, je pourrai enfin m’atteler à un autre livre, une biographie historique cette fois, sur laquelle je travaille épisodiquement depuis plusieurs années. Et sur certains projets que je partage avec Alain.

Mais là, chuuuut…. il est un peu tôt pour en parler.

 

Jean-Claude Dreyfus sur scène: allez le voir!!!

5 avril, 2009

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Jusqu’au 26 avril, le comédien Jean-Claude Dreyfus est sur scène dans  »Rictus soliloquant ».

Jehan Rictus est considéré comme l’un de nos plus grands poètes, malheureusement oublié…

Je vais être honnête: je n’ai pas vu la pièce, même si je meurs d’envie de filer à Paris pour le faire. Mais les articles écrits par les journalistes y ayant assisté sont plus qu’élogieux pour Jean-Claude Dreyfus qui habite les  textes avec cette force et cette sensibilité qui signent sa personnalité. Il donne la réplique, sur scène, à Fabrice Carlier, sur lequel la critique ne tarit pas d’éloges non plus.

Ce comédien si spécial, j’ai la chance d’avoir pu l’interviewer (voir dans la rubrique « rencontres »). Nous avons gardé contact, peu fréquent, mais toujours chaleureux. Force de la nature, homme d’esprit, un peu rebelle, et de coeur, il est fascinant. Alors, si vous êtes à Paris ou si vous avez l’occasion de vous y rendre, n’hésitez pas: allez le voir sur scène!

Martine Bernier 

Vingtième Théâtre, 7 rue des Plâtrières, Paris XXe. Tel. 01 43 66 01 13, les mercredis, jeudis et vendredis à 21h30. De 12 à 22 euros.

Achille Talon n’arrête pas le progrès

5 avril, 2009

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Depuis que je suis haute comme trois pommes, j’aime Achille Talon.
J’ai toujours trouvé que ce personnage, né de l’imagination du délicieux Greg, était l’être le plus séduisant de la planète juste derrière Robert Redford.
Ses envolées lyriques, ses colères, sa mauvaise foi et son foie douteux, ton voisin, son papa, sa bière, sa voiture: tout me plaît en lui.

La sortie d’un nouvel album est donc à chaque fois un événement.
J’ai dégusté « Achille Talon n’arrête pas le progrès » avec délectation, bien tassée au fond de mon canapé.
Bien sûr, Greg n’est plus là, se prélassant dans les nuages avec Frankin, Peyot et les autres…

Mais il a laissé son bébé et ses crayons à Veys et Moski.
Fidèles à l’esprit du Maître, ceux-ci nous ont concocté un album comme on les aime, délicatement disjoncté.
Lefuneste y est toujours aussi véreux, les indignations taloniennes aussi dithyrambiques, et son amour pour la belle Virgule aussi démonstratif.
il arrive que le dessin soit parfois un chouillat moins sûr qu’il ne l’était autrefois, mais là, franchement, je chipote…

Talon reste un être à part dans le monde de la BD, une valeur sûr en compagnie duquel il est impossible de s’ennuyer…

Martine Bernier

« Achille Talon n’arrête pas le progrès », Vey et Moski, Ed. Dargaud.

Mes voisins, mon jardin et Eusèbe la tondeuse

5 avril, 2009

J’ai une chance incroyable.
Les gens sont d’une gentillesse ahurissante avec moi.
En arrivant en Bretagne, j’étais pourtant un peu inquiète.
Et si c’était différent?
Allaient-ils accepter ce spécimen de nana plus proche de l’OVNI que du schéma classique de la ménagère idéale?

Trois jours après mon arrivée, j’ai fait la connaissance de mon voisin d’en face, Frédéric, jeune père de famille. Puis j’ai rencontré son épouse, Béatrice, et leur fille, Aurore, et, plus tard, les autres voisins qui m’entourent.
Les contacts que nous entretenons sont très chaleureux.
Je pense qu’ils ont compris que, pour le moment, je ne connais pas encore grand monde, et que le fait qu’ils soient là m’était très précieux.

Cette semaine, en allant chercher le courrier, je croise Frédéric, qui accomplissait la même démarche que moi.
Je lui ai demandé s’il pouvait me dire où nous devions nous débarrasser de l’herbe une fois que nous la couperions dans le jardin. Il m’a répondu, puis nous avons fait un brin de causette.
Et j’ai reçu un joli cadeau matinal…
Il m’a demandé si nous aimions les palourdes. J’ai eu une moue significative: Alain et moi adorons les fruits de mer!
Il m’a dit: « Je suis désolé, mon père est allé en pêcher, et j’en avais tellement que j’ai dû en jeter. Mais la semaine prochaine, je vous en donnerai. Et je vous ramènerai des huîtres, aussi. »

J’étais estomaquée. D’abord parce que je ne m’attendais pas à ce qu’il me propose quelque chose d’aussi adorable. Ensuite parce que j’ignorais qu’il était permis de pêcher ce genre de précieux coquillages sans autorisation. Il m’a expliqué qu’ici, tout le monde le faisait et que c’était permis du moment que l’on ne dépassait pas un certain quota de pêche.

Au passage, mon précieux voisin m’a également dit que si je n’arrivais pas à mettre la tondeuse en route quand Alain n’est pas là, il le ferait volontiers pour moi dès qu’il sera remis d’une opération du canal carpien qui l’handicape ces jours-ci.

Quand nous nous sommes dit au revoir et que je suis rentrée, j’ai repensé à une phrase que quelqu’un de ma famille m’a souvent dite lorsque j’étais jeune.
« Toi, à t’entendre, les gens sont merveilleux, le monde est merveilleux, tout est merveilleux! »

C’était un peu exagéré.
Mais je crois ne pas avoir tellement changé, finalement.
Je ne suis pas naïve. Mais j’ai toujours été émerveillée par la gentillesse spontanée, c’est vrai.

Bref. Vendredi, il faisait beau. Alain m’avait quittée le matin, j’avais le cœur gros. Et quand je dis gros… c’est très en dessous de la réalité.
Connaissant la fragilité de son dos, je me suis dit que c’était le moment ou jamais de m’attaquer au jardin, afin qu’il ne soit pas tenté de le faire en revenant.

Je me suis glissée dans le garage où la tondeuse siestait innocemment, à l’abri des regards indiscrets.
Notre tête-à-tête a ressemblé à « Règlement de comptes à OK Corral ».
Je me suis avancée vers, elle, ai sauté sur la bête, et j’ai essayé de la mettre en marche.
Après plusieurs essais infructueux… j’ai réussi!
J’en ai donc conclu que je pouvais me lancer dans l’opération Eusèbe.
L’opération Eusèbe étant le nom de code donné par mes soins à la tonte du jardin.
C’est idiot, mais les voyages en Absurdie me motivent.

J’ai traîné ma victime dans le jardin (le petit malin qui a placé une marche à la porte arrière du garage mériterait la bastonnade publique!), et je me suis dirigée vers le bout du bout. Dehors, Johann et son copain Léo ont couru à ma rencontre dès qu’ils m’ont vue.
J’ai fièrement lancé le moteur (bon, il a fallu quatre tentatives, mais j’y suis arrivée!) et j’ai commencé à œuvrer.

N’imaginez pas un aller-retour gracieux et très classe. Tondre la savane, ce n’est pas simple. Je me demande si je n’aurais pas dû la laisser ainsi, d’ailleurs. Il aurait suffi d’y rajouter un marais pour donner envie à un Bec-en-Sabot (voir rubrique « Le plus mystérieux des Oiseaux) de s’y installer…
Au bout de 10 minutes, Eusèbe avait déjà l’estomac plein.
J’arrête le moteur, me perd dans une réflexion intense.
Grand conciliabule avec mes deux apprentis: que faire de l’herbe rasée?
Ils m’expliquent que les précédents locataires la mettaient au bout du jardin, dans le « pré aux moutons ».
- Ah bon? Le pré aux moutons? Mais… où sont les moutons?
- Ils viennent parfois…
- Et ils aiment l’herbe coupée?
- Non, pas vraiment…

De toute façon, en l’occurrence, je n’ai pas le choix. Si je veux pouvoir continuer mon Œuvre, il faut que je me débarrasse de la verdure. Je n’allais quand même pas me la préparer en salade… Suivie de mes deux acolytes, je m’exécute donc, reviens vers la tondeuse, lui replace son estomac, m’empare du cordon pour lancer le moteur, tire fermement et… rien.
Sans me démonter, je réessaie, une fois, deux fois… dix fois.
Toujours rien.
Je ne suis pas violente pour un sou.
Mais là, si j’avais pu, j’aurais pendu la bestiole par les pieds à mon pommier et j’aurais attendu qu’elle sèche.

Juste au moment où je me disais que j’allais devoir lamentablement abandonner, Frédéric est venu à la rescousse. Malgré sa main convalescente, il a relancé le moteur (en une fois, comme Alain!!! Agaçant, ça!), et m’a dit que, par la suite, nous tondrions nos pelouses en osmose pour qu’il prenne mon herbe avec la sienne dans une remorque qu’il mènerait à la déchetterie.
Et je suis repartie pour un tour sous l’œil de Johann et Léo.
Ils s’amusaient beaucoup, mais discrètement, mes petits compagnons. N’ayant pas l’esprit géométrique, je ne tondais apparemment pas dans les règles de l’art, en belles et longues lignes régulières.
Ma tonte était plutôt du genre: je vais où je peux, ou plutôt je suis la tondeuse!

Ils ont été chercher un râteau pour m’aider, passant derrière moi et ramassant l’herbe laissée là par ma machine. Comme je n’avais une fois de plus pas mis mes lunettes et que ma ressemblance avec les taupes se confirme au fil du temps (je parle de la myopie, ignares!), ils me guidaient, me disant où je devais repasser, quels coins j’avais oubliés…
Deux véritables GPS sur pattes!

Une heure plus tard, le jardin ressemblait plus ou moins à un jardin.
Et si l’herbe a le malheur de repousser d’ici le retour d’Alain, lundi, je la tond au napalm la prochaine fois!

J’ai offert une tournée de jus d’orange, ai récompensé mes petits apprentis, et j’ai rangé la tondeuse. Vaincue et épuisée, elle n’en menait pas large.
Veni, vidi, vici, comme dirait Jules!

Plus tard, j’ai fait un brin de causette avec Béatrice, la maman de Johann et d’Aurore, dans mon jardin qui sent la menthe fraîche. (Heu… Eusèbe a dû en couper par inadvertance…)
Son mari nous a rejointes, m’invitant chez eux pour un verre de sirop salvateur après l’effort. Nous sommes ensuite revenus chez Alain et moi, en procession, pour nous pencher sur mon problème de rideaux. Trois têtes remplies d’idées valent mieux qu’une!
Puis nous nous sommes quittés.
Une heure plus tard, Scotty m’avertissait que quelqu’un frappait à la porte.
J’ai ouvert et je me suis retrouvée face à Aurore.
Celle-ci m’apportait deux crêpes toutes fraîches, de la part de ses parents.

Qu’est-ce que je disais au début, déjà?
J’ai une chance incroyable.
Et je n’ai jamais été aussi émue par deux crêpes…

Martine Bernier

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