Archive pour octobre, 2009

Saint Skype

31 octobre, 2009

Je remercie une fois encore Skype, ce petit programme magique qui nous permet de dialoguer de vive voix, avec en prime l’image de la personne en face de nous, même si 1000 km nous séparent d’elle.
Il m’a permis aujourd’hui de revoir et de retrouver une partie de ceux que j’aime dans ma Terre de Sel (manquaient Béa, – dont c’est aujourd’hui l’anniversaire! – Fred, Aurore, Théo et Yoyo).
Mais j’ai pu parler avec Véro, mon bon géant. Et Thierry. J’ai même entrevu ses enfants et vu passer Clément en coup de vent
Précieux Skype qui nous donne l’impression que ceux que l’on aime sont dans notre bureau ou notre salon.
Quand je pense à nos ancêtres qui, privés des leurs lors de leurs absences, n’avaient que le recours de la lettre remise par courrier à cheval après des jours de voyage, selon le lieu où ils se trouvaient….

En ce moment, j’aime spécialement les moyens de communication modernes.
Et, tiens, j’ai même un faible pour l’avion.
Même s’il ne permet pas de transporter en bagage accompagné une centaine d’huîtres fraîchement pêchées. Difficile de faire passer une colonie d’huîtres sauvages pour des animaux de compagnie…

J’ai appris aujourd’hui que les Bretons (les purs, pas ceux qui font semblant de l’être alors qu’ils sont en fait parisiens) sont sans doute les êtres les plus pudiques de la planète.
Un peu comme les montagnards.
J’aime bien.
Notez qu’ils savent vivre, si j’en crois le verre de Rouge d’Anjou accompagnant un morceau de chocolat suisse qui trônaient devant la webcam.

Il se fait un peu tard sur cette soirée d’Halloween…

M.B.

Les objets trouvés les plus étranges

30 octobre, 2009

Je vous avais dit que je vous entraînerais dans un monde spécial, cette nuit. Je tiens parole: je vous emmène dans l’univers des objets trouvés de Paris. Autrefois, les objets égarés appartenaient au roi ou au seigneur. Puis les choses ont changé. En 1939, le service spécifique  des objets trouvés a été installé au 36 de la rue des Morillons dans le 15e arrondissement. Aujourd’hui, il reçoit 140’000 objets par an. J’ai toujours été fascinée par la distraction des gens. En lisant la liste des objets les oubliés les plus insolites, on peut s’interroger.. Jugez vous-mêmes…

Une casquette de l’Armée Rouge. Une chaise roulante pour handicapé. Un crâne humain. Un dentier. Un exemplaire de Harry Potter… en tibétain. Une langouste naturalisée. Un lingot d’or. Un oeil de verre. Une poupée gonflable. Une prothèse de jambe trouvée le 10 décembre 2004 dans un bus… et qui n’a toujours pas été réclamée par son propriétaire. Une tronçonneuse. Trois urnes funéraires. Une valise d’infirmière remplie de prélèvements. Une veste de pompier new-yorkais.

Dans le genre distrait, je suis ravie de découvrir qu’il y a pire que moi!

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J’ai eu un appel, cet après-midi, qui m’apportait une nouvelle un peu meilleure que celles d’hier. Lorsqu’il s’agit de la santé d’un enfant, les hommes dignes de ce nom se mobilisent. C’est ce qui se passe en ce moment. Ce genre de situation a un bon côté: elle permet d’aller à l’essentiel, de découvrir les êtres pour ce qu’ils sont vraiment et de mettre en commun ce que chacun a de meilleur… Ou de pire dans le cas d’un homme en particulier qui est le seul que j’ai connu à agir comme il l’a fait. Dans le cas présent, j’aime ce que je découvre.

Martine Bernier

Chaud et froid.. plutôt froid…

29 octobre, 2009

Je ne sais pas comment font les personnes qui arrivent à être insensibles à la détresse des autres. C’est une chose que je suis incapable de faire.

Ce soir est un soir gris. Parce que je sens que quelqu’un auquel je tiens ne va pas bien.

Oui, il fait plutôt froid, ce soir. Si j’avais le pouvoir d’agir sur les destins, il y a deux ou trois choses urgentes que je ferais sans attendre. Je remettrais des choses à leur place.  Parce que là, vraiment, j’ai l’impression que le monde tourne à l’envers.

Demain, je vous emmènerai dans un univers très insolite. Mais cette nuit, je n’ai pas vraiment le coeur à écrire. Mon esprit est quelque part en Terre de Sel.

 

Martine Bernier

Amala et Kamala, les enfants loups

28 octobre, 2009

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 Connaissez-vous l’histoire d’Amala et Kamala? Elle dit ceci….

En octobre 1920, un certain révérend Singh captura (oui, vous avez bien lu: captura…) deux petites filles âgées de trois et cinq ans. Leur particularité? Elles avaient vécu avec une meute de loups non loin du village de Midnapore, en Inde.

Baptisées Amala et Kamala, elles étaient muettes, mis à part quelques grognements émis, marchaient à quatre pattes et avaient un goût prononcé pour la viande crue.

Les petites filles affichaient un comportement « sauvage ». Elles refusaient d’être habillées, mordaient et griffaient ceux qui les approchaient. Elles ne semblaient pas avoir de sentiments humains, si ce n’est la peur, vivaient la nuit, et avaient les mêmes particularités que les loups qui les avaient élevées.

Amala mourut au bout d’un an d’existence « civilisée », des suites d’une infection rénale. Kamala sembla souffrir de la mort de sa soeur. Plus âgée qu’elle, elle commença à se laisser approcher et évolua jusqu’à accepter de vivre dans une maison, en compagnie d’autres personnes. Elle réussit à acquérir  un vocabulaire de 45 mots, n’arriva jamais à marcher réellement debout et finit par s’éteindre en 1929, de fièvre typhoïde.

Voici donc l’histoire telle qu’elle a été rapportée. Mais des recherches menées par Serge Aroles, chirurgien et auteur du livre « Les Enfants Loups », semblent démontrer que tout cela n’était que supercherie et que jamais ces fillettes, dont l’aînée devait être déficiente mentale, n’ont vécu chez les loups.

Quant au révérend Singh, il semblait être un vilain coco, puisqu’il semblerait qu’il battait les enfants et s’était engagé à exhiber Kamala aux Etats-Unis. L’histoire était juteuse… la réalité nettement moins romanesque…

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J’ai reçu une mauvaise nouvelle, aujourd’hui.
Mais je relativise. Ce jeudi, je pense surtout à un jeune garçon qui va passer des examens médicaux douloureux. Je pense à son père qui, je crois, donnerait n’importe quoi pour vivre tout cela à sa place. Ceux que j’aime là-bas, je ne les lâche pas du coeur…

Martine Bernier

Les livres…

27 octobre, 2009

12 % des jeunes Français sont illettrés. Et 20 % de plus arrivent à peine à lire, mais si difficilement qu’ils ont beaucoup de difficultés à comprendre le texte qu’ils ont sous les yeux.

C’est affolant.

Un nombre impressionnant de personnes n’ont jamais lu un livre de leur vie, alors qu’elles maîtrisent parfaitement la lecture.

Quand on passe le plus clair de son temps à écrire, ce genre de nouvelles est déprimant.

Depuis que je suis haute comme trois pommes, je lis. J’ai commencé bien avant d’aller à l’école. L’univers des mots me fascinait tellement que je voulais y entrer, par n’importe quel moyen. Comme si je découvrais un langage codé. Je me souviens encore avec précision que j’ai concentré tous mes efforts pour les identifier. Je regardais des images, demandait à mon père de me dire ce qui était marqué dessous. Puis j’identifiais les mots, les lettres et je les recherchais ailleurs, les retrouvais…

J’avais quatre ans, et, lorsque je suis remontée un matin dans la cuisine en lisant le journal à haute voix, mon père a été si stupéfait et si heureux que j’ai eu l’impression d’avoir réalisé un exploit. Alors que je m’étais simplement fait plaisir.

Après ce jour, la situation a pris une ampleur assez ahurissante. Je lisais tout, absolument tout ce qui me tombait sous la main.  Tout le temps. En désespoir de cause, fatigué d’écouter à longueur de journée le contenu des étiquettes des bouteilles de lait ou la posologie des boîtes de médicaments, mon père a commencé à m’offrir des livres.  Beaucoup de livres. Mais il fallait suivre mon rythme. Je ne lisais pas: je dévorais! Toute la collection rose, la collection verte, les BD…  La nuit, sous mes couvertures, à la lueur d’une lampe torche. Mon père me disait que je m’abîmais les yeux, que j’en souffrirais une fois adulte. Il avait raison.

Après sa mort, plus de livres. J’ai donc été puiser en cachette dans sa bibliothèque. Ce qui m’a valu de lire Stendhal, Flaubert, Zola, Balzac et tant d’autres entre 9 et 11 ans.  Mais aussi Simenon, Cronin, Pierre Loti. Tous ces auteurs qu’il aimait. J’apprenais à découvrir les goûts de mon père à travers ses lectures.

Le cadeau le plus merveilleux que j’ai reçu à cette période a été un énorme carton rempli de « Marabout Junior » apporté par ma grand-mère paternelle. Sa voisine souhaitait s’en débarrasser. Des biographies, des livres d’aventures…. j’ai lu, lu… j’ai passé des jours et des nuits à lire…

Avec le temps, cela ne s’est pas arrangé. A tel point qu’aujourd’hui, j’ai eu beau trier, donner à tour de bras, je me retrouve toujours avec 4 à 5000 livres. Ils prennent de la place, sont affreusement lourds, mais je les aime.

J’ai un mal fou à résister lorsque je passe devant une librairie. Cet été, Fred et Béa m’ont fait une surprise épatante. Ils m’ont emmenée dans une brocante de livres… Je déménageais, je ne voulais pas en racheter après avoir passé des jours et des jours à les mettre en carton. Sans l’aide d’Alain, bien sûr, remarquable d’indifférence et de cruauté, à son habitude depuis la mi-mai. Je n’ai donc pas adopté de nouveaux protégés. Mais quel bonheur de traîner parmi ces caisses de livres…

Quand je pense que tant de gens ne lisent pas, ne connaissent pas le bonheur de se balader parmi les pages, cela me stupéfie, me désole.

Martine Bernier

Source: les chiffres avancés sont sont ceux cités par Luc Ferry, ancien ministre de l’éducation, dans une émission traitant de l’illettrisme le 27 octobre 2009.

Degas: le si bel orchestre de l’Opéra

26 octobre, 2009

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Edgar Degas avait une passion: l’Opéra. Une passion telle qu’il a consacré 200 oeuvres au sujet. Tout le monde connaît ses danseuses, ses petits rats, ses tourbillons de tutus, ses grâces et ses mouvements dansants.

Et puis, il y a un tableau extraordinaire: l’Orchestre de l’Opéra… Un sujet et un style radicalement différents, mais un tableau restant parfaitement lié au thème qui fascinait cet artiste dont les psychiatres diraient qu’il était atteint de monomanie pour ne s’être consacré qu’à un seul sujet.

Un jour donc, Degas a décidé de peindre l’orchestre. Il y connaissait des musiciens.  Le bassonniste, Désiré Dihau, par exemple, qui était son ami. Oui, il connaissait bien ces hommes de notes. Et pourtant, son orchestre est parfaitement farfelu. Non seulement les artistes ne sont pas à leur place, mais, en prime, il s’est amusé à peindre des amis et connaissances n’ayant strictement rien à voir avec la formation. On reconnaît ainsi un médecin, un ami ténor espagnol, un compositeur… Quant au violoniste rêveur, il s’agit de son ami, le peintre Piot-Normand. Degas prenait ses croquis sur le vif et recréait les visages dans son atelier, à sa guise. Et il s’amusait, le bougre!

L’ensemble, revisité par la malice du peintre de l’Opéra a donné… un chef-d’oeuvre. Il y a placé des plans superposés, n’hésite pas à « décapiter » les danseuses pour mettre l’orchestre en valeur. Novateur pour l’époque… 

Degas avait beaucoup de points communs avec Manet. C’était un peintre des visages. Les paysages ne l’intéressaient pas. Mais le mouvement… le mouvement… Il a mis son talent à son service. Et il nous séduit toujours aujourd’hui.

Et puis… il y a eu le drame.

Beethoven est devenu sourd. Degas (1834-1917), lui, a connu le pire pour un peintre: une maladie des yeux a dégénéré jusqu’à la cécité totale. Une tragédie pour cet être au caractère difficile et solitaire qui a dû arrêter de peindre en 1911. Mais avant d’en arriver à cette extrémité, il a adapté son travail, renonçant à l’huile, demandant trop de finesse, pour se rabattre sur le pastel.

Pauvre Degas…

Martine Bernier

La civilisation perdue…

25 octobre, 2009

 Teotihuacan veut dire « lieu où naissent les dieux ». Personne ne connaît le nom réel de cette cité, si ce n’est celui-ci, que lui donnèrent les Aztèques, six siècles plus tard, quand ils ont pénétré dans les lieux. Lorsqu’ils découvrirent les édifices présents, ils pensèrent que seuls des dieux avaient pu les construire. J’imagine ce qu’ils ont vu… Une ville d’autrefois, impressionnante, aux murs recouverts de peintures, et marquée des souvenirs d’un passé chargé. Une ville avec de vrais quartiers, sans doute réservés aux différentes ethnies.

L’expression artistique de Teotihuacan était puissante, comme en témoignent les sculptures colossales, les peintures murales, masques rituels, statuettes-offrandes, poignards en forme d’éclairs, bijoux et autres céramiques, soit 450 pièces exposées au Quai Branly, à Paris. Des objets provenant presque totalement des collections mexicaines, dont une grande partie n’a jamais été présentée en Europe.

Pendant sept siècles, elle a été la capitale  culturelle et artistique de la Mésoamérique. Aujourd’hui, les pyramides de la Lune et du Soleil et le Temple du Serpent à plumes de Teotihuacan se dressent toujours à près de 2300 mètres d’altitude.

Mais pour quelles raisons la cité a-t-elle connu un tel déclin? La ville a probablement été victime de sa violence. Certains avancent l’hypothèse de l’arrivée d’envahisseurs voisins.

Les sculptures sont là pour en témoigner: la mort est très présente dans la culture de Teotihuacan. Le dieu de la Mort à tête de squelette, nommé Huehueteotl est le symbole mêlé de la mort et celui du soleil. C’est à lui que furent sacrifiés de nombreux hommes. Leur culture était violente, les sacrifices humains ont été prouvés. Sous leur gouvernement militaire, les habitants de la cité donnaient des prisonniers en offrande. Et ces derniers étaient parfois des personnes de haut rang, comme en témoignent les statuettes et les riches parures qui ont été retrouvées dans leurs tombes, accompagnées d’ossements d’animaux.

Quel dieu adoraient ces hommes pour justifier d’une religion aussi cruelle? Ils étaient plusieurs, mais parmi eux se trouvait le fameux Serpent à plumes, Quetzalcoatl, qui trouve son origine dans la religion de Teotihuacan.

Cette civilisation, la plus grande de l’Amérique précolombienne, reste un mystère, comme le sont toujours les mégalithes de Carnac. Les artistes de la cité ont réalisé de nombreux masques en pierre recouverts de céramiques, trop lourds pour être portés. Les bibelots incrustés de coquillages et de pierres de couleurs témoignent d’un mordernisme ahurissant.

L’exposition durera jusqu’au 24 janvier 2010. Qu’est-ce que j’aimerais la voir et en connaître plus sur cette civilisation perdue…

Martine Bernier

www.quaibranly.fr

La maison aux coccinelles

24 octobre, 2009

Tandis que le monde se mobilise pour attirer l’attention des dirigeants sur l’avenir de la planète, je cohabite, dans l’appartement où j’ai posé mes livres et mes guitares, avec des co-locataires aussi gracieuses qu’inattendues: des coccinelles. A Saint-Molf, j’observais le quotidien ralenti d’une colonnie d’escargots qui m’amusaient par leur sans-gêne et leur ténacité à revenir chaque jour à l’assaut de l’appui de fenêtre. Je riais nettement moins face aux araignées monstreuses qui apparaissaient régulièrement, provoquant chez moi des réactions qui devaient en revanche beaucoup distraire ces hôtes indésirables.

Depuis plusieurs jours, je vois apparaître dans différentes pièces de l’appartement, des bêtes à Bon Dieu qui, elles, me sont plutôt sympathiques. C’est d’ailleurs le seul insecte que je tolère dans ma sphère… Oui, je sais, c’est injuste pour les autres qui n’ont pas choisi leur physique. Et comme, évidemment, il m’est impossible de vivre avec quelqu’un que je ne connais pas, il a fallu que je me renseigne sur leurs us et coutumes. Et.. c’est fou le nombre de bêtises auxquelles nous avons pu croire à leur propos… Vous êtes de ceux qui imaginiez  que le nombre de  points qu’elles ont sur leurs élytres correspond à leur âge? Et bien non! Juste à leur espèce. Oui, je sais, c’est déçevant, mais c’est ainsi. Elles ne meurent pas en hiver: elles dorment. Et dans le cas présent, elles prennent mon domicile pour leur dortoir.

Les jardiniers les aiment. Normal: elles adorent les pucerons. et, pour certaines, les acariens J’aurais préféré qu’elles apprécient les araignées en apéritif, mais bon… Elles se rachètent à leur manière puisque, depuis le Moyen-Age, elles ont la réputation de porter bonheur.

Là, j’avoue que cela m’arrangerait. Parce que le bonheur, je ne sais plus vraiment ce que c’est.

Mais ce soir, en regardant ma coccinelle se poser sur ma main, je pense à un enfant. Un jeune adolescent qui ne va pas bien en ce moment, et qui va devoir subir de nouveaux examens médicaux la semaine prochaine. Je ne l’ai jamais rencontré. Mais si vraiment ces petites bestioles rouges me garantissent le même résultat que le passage d’une étoile filante, c’est à lui que je dédie mon voeu.

Martine Bernier

 

Champagne Lanson… incursion dans un monde de bulles

23 octobre, 2009

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Or donc, comme dirait je ne sais plus qui, Thierry, qui se révèle être un ami aux multiples facettes, adore me taquiner.
L’un de ses chevaux de bataille favoris est le vin. Connaisseur, il sait les choisir, sait aussi les apprécier.
Et trouve parfaitement incohérente l’idée que l’on puisse écrire sur un sujet aussi respectable sans jamais en avoir bu.
Comme il me chatouillait sur le champagne, nectar parmi les nectars, j’ai décidé de lui dédier le dossier ci-dessous.
Deux mois avant Noël, il peut être d’actualité, et était paru dans un numéro spécial de l’hebdomadaire suisse Terre et Nature.
Pour le réaliser, Eric, à la photo, et moi à la plume nous étions déplacés à Reims où nous avions passé deux jours dans la maison Lanson il y a trois ou quatre ans, chaleureusement reçus par le représentant de la société.
J’avais eu la chance de me voir décerner un prix journalistique qui nous avait valu cette visite.
Difficile de la faire dans de meilleures conditions…

Pour Thierry, donc, incursion au coeur d’un breuvage que l’on peut apprendre à connaître sans forcément en boire…

CHAMPAGNE, « FETES » VOUS PLAISIR !

Hôte incontournable des tables de fêtes, le champagne possède une histoire, un mode de vinification et des rituels qui lui sont propres. Immersion dans un monde de bulles, et visite à l’une des plus anciennes maisons de champagne: la maison Lanson, à Reims.

À Reims, l’accès à la maison Lanson est barré par une grille, élégante mais solide. Rien de plus normal. Le bâtiment se doit d’être bien protégé, lui qui abrite un trésor. Dans ses caves creusées à l’horizontal dans la colline devant laquelle il a été construit, reposent des millions de flacons de champagne.
Dans cette atmosphère naturelle et constante de 11 degrés et d’un taux de 90 % d’hygrométrie, se prépare l’un des vins les plus porteurs de fantasmes. Un nectar dont, ici, tout le monde parle avec un enthousiasme compréhensible puisqu’il fait vivre les quelque 90 employés de la maison.
« Je pensais que, habitant la Champagne, et travaillant dans le champagne, on risquait de s’en lasser, confie Evelyne Goulet, responsable des relations publiques. Mais pas du tout! Chez Lanson, nous dégustons quotidiennement avec les visiteurs, et, le week-end, nous ouvrons du champagne pour recevoir la famille et les amis. Mais cela reste toujours un moment magique. Il est vraiment là pour fêter l’amitié, les bons moments, un voyage… Quand vous êtes dans un bel endroit, une flûte de champagne ajoute encore à la magie. C’est un produit merveilleux. On sait que le champagne est lié au succès, à un examen, à la fête, à une naissance, à la joie, aux fiançailles… Un jeune homme qui veut demander sa fiancée en mariage et qui va la chercher à la gare peut être certain que le moment sera encore plus extraordinaire avec une demi-bouteille de champagne et deux flûtes. Elle en parlera autant que de la bague qu’elle recevra! Le champagne permet de recréer des moments magiques dans le quotidien. C’est un luxe abordable. »

L’âme de la maison

La fidélité des employés de la maison Lanson est étonnante. Beaucoup d’entre eux avouent y travailler depuis vingt-cinq, voire trente ans et plus. « Nous sommes très flattés de travailler pour une maison et un produit aussi prestigieux, reconnaît Mme Goulet. Il y a un attachement de la part du personnel. La maison a une âme. Elle a changé de mains, mais les mêmes personnes sont restées. L’esprit Lanson a été maintenu. »

La route est longue, pour réaliser le précieux produit. Chaque étape de la préparation du champagne est sur exécutée avec minutie. Chez Lanson, lors des vendanges, effectuées à la main, le pressurage ne se fait pas dans la maison-mère, mais à proximité des lieux de récoltes dans des bâtiments appartenant à l’entreprise. Il repose là durant seize heures. Trois cépages sont utilisés pour la conception du champagne: le Chardonnay, le Pinot Noir, et le Pinot Meunier. Le champagne Lanson est fortement marqué par les Pinots noirs et pinot meunier. Les jus sont ensuite répartis dans des cuves de fermentation en inox, représentant un total de treize millions de bouteilles.
Quelques grandes maisons et vignerons indépendants élèvent leurs vins en barriques, conférant à leurs vins une touche boisée plus ou moins discrète. Ce type d’élevage sous bois tend à progresser.

D’une fermentation à l’autre

Chaque village, chaque lieu-dit, chaque cépage est bien séparé afin de préserver les goûts et les arômes propres à chacun. Sous l’action des levures, la fermentation dite alcoolique démarre et le sucre se transforme en alcool et en gaz carbonique. Lorsque les levures désactivées sont tombées dans le fond des cuves, les ouvriers procèdent au soutirage afin de séparer le vin de la lie. Dès décembre, les dégustations commencent en vue des assemblages destinés à l’élaboration des différentes cuvées. À ce stade, le chef de cave choisit de provoquer ou pas une fermentation dite malolactique. Chez Lanson, cette méthode n’est pas pratiquée. Commence ensuite la phase délicate des assemblages au cours de laquelle les cuvées sont conçues, composées de vins issus de différents crus, de différents villages, de différentes années.

Le principe majeur de l’élaboration du champagne peut enfin débuter. Le vin est mis en bouteilles, et une première liqueur, la liqueur de tirage, mélange de sucre et de levures, est ajoutée. Chaque bouteille est fermée par un bouchon creux en plastique et une capsule métallique puis stockée en cave de vieillissement. La seconde fermentation alcoolique peut débuter, l’opération est plus communément appelée « prise de mousse ».

Le délicat remuage

Sept kilomètres de galeries et trois étages de caves modernes accueillent le vin pour une longue période de vieillissement. Dans la nuit de ces souterrains, le vin évolue.
« Au 18e siècle, on vendait le champagne avec son dépôt, car on ne savait pas le retirer, explique Evelyne Goulet. Le fond des verres était alors creux et descendait jusqu’au pied où se déposait ce dépôt. Aujourd’hui, ce dépôt, composé des levures désactivées, se retire juste avant que le vin ne soit vendu. On ne peut pas les entraîner directement dans le bouchon, parce qu’elles adhèrent sur le verre et parce que, si on agite la bouteille, ces particules très légères se mélangent au vin et restent en suspension. On les appelle des voltigeurs. Elles se collent entre elles lorsqu’elles se retrouvent. Donc, plus il y aura de mouvements réguliers et précis, plus les voltigeurs s’agglutinent et se colmatent, et plus il sera facile de les entraîner dans le bouchon. C’est le but de l’opération dite du remuage. Pour le remuage manuel, des supports ont été conçus de façon astucieuse: chaque orifice accueillant une bouteille permet de la tourner de 19 façons différentes. Les remueurs remuent environ 50’000 bouteilles par jour, soit 3 bouteilles à la seconde, dans des conditions difficiles de froid, d’humidité. Depuis 25 ans, il existe des machines, les giropalettes qui tournent les bouteilles en caisse. Manuellement, nous étions limités dans le positionnement des bouteilles. Avec les giropalettes, nous avons 99 positions par programme. La bouteille termine tête en bas. Lanson s’est équipé en 1988 seulement de ce système de remuage automatique. Nos magnums de Noble Cuvée sont encore remués à la main car les bouteilles ont une forme particulière. »

Les dangers des caves

Le travail des ouvriers cavistes présentait des risques, comme en témoigne la présence d’une statue de la Vierge Marie, posée dans une niche, au-dessus d’une galerie. Les ouvriers travaillaient sous sa protection. À l’époque, les bouteilles explosaient facilement, provoquant beaucoup de blessures dans les caves tels que des tendons coupés, ou des yeux touchés. Le vin repose tout d’abord sur son dépôt. En Champagne, si le vin a vécu quinze mois dans les caves, il est permis de le vendre un mois après le remuage. Lanson préfère, de son côté, le conserver plus longtemps, pour lui permettre de vieillir et de se bonifier paisiblement.
Lorsque le dépôt est concentré au niveau du goulot de la bouteille, à l’intérieur du bouchon en plastique, le col de chaque bouteille est plongé dans un bain à -28 °c. Le glaçon ainsi formé est alors expulsé. Une seconde liqueur, la liqueur d’expédition composée de sucre et de vins, est injectée dans la bouteille. Enfin, un bouchon définitif en liège est placé, maintenu par un muselet en acier, cerclage de métal consolidant l’arrimage du bouchon.

L’Alchimiste de Lanson

Les vendanges 2005 sont à peine terminées que, déjà, le breuvage en formation subit ses premières analyses. Des échantillons de Chardonnay et de cépages rouges (Pinot Noir, Pinot Meunier) ainsi que l’assemblage des deux pinots ont déjà été dégustés. Parfums d’agrumes, de banane, de fruits rouges… Jean-Paul Gandon, chef de cave chez Lanson depuis 32 ans, est satisfait de cette prise de contact. Épicurien jusqu’au bout des ongles, cet amoureux des roses, du vin et des repas raffinés est investi d’une mission primordiale. C’est à lui que le champagne Lanson doit sa personnalité. Entouré d’un panel de dégustateurs compétents, il a notamment la responsabilité de la cave, de l’assemblage qui permettra, chaque année, de reproduire le brut dit « sans année ». Ce vin, qui est le plus représentatif de la maison, représente 80 % de la production. Il est élaboré à l’aide des vendanges de réserves stockées chaque année, dont les assemblages permettent de reproduire le goût et le style Lanson prisés par la clientèle.
« La dégustation reste très physique, explique M. Gardon. Comme tout exercice physique, il faut s’entraîner en dégustant souvent. En ce qui concerne les assemblages, il faut les faire dès la fin de la fermentation alcoolique. Je dirais que le plus intéressant au début, est de goûter le raisin. Cette année, je l’ai trouvé très goûteux, savoureux. La chair n’avait pas seulement le goût sucré, mais autre chose, de plus intéressant. Avec ces échantillons de premiers vins, nous sommes dans la continuité. »

Dernières parures

Comme toutes les maisons de Champagne dignes de ce nom, Lanson soigne le moindre détail. L’élégance du produit doit se retrouver jusque dans la forme des flacons, le choix des capsules et la teinte des étiquettes. Si la majeure partie de l’habillage est réalisée mécaniquement, pour certains flacons de prestige, les étiquettes sont posées à la main, uniquement par des femmes. Lorsque les bouteilles, enfin terminées, quittent les bâtiments dans leurs palettes, elles reviennent à leur point de départ, pour être expédiées vers leurs différentes destination. Elles partent de l’endroit exact où, plusieurs années auparavant, le précieux nectar qu’elles contiennent arrivait pour la première fois, sous forme de jus de raisin.

LA PARTICULARITE DE LANSON

La maison Lanson a la particularité d’être une des rares maisons de champagne à ne pas provoquer la fermentation malo-lactique. Ce phénomène se déclenchait autrefois spontanément. Après la fermentation alcoolique, le vin pouvait à nouveau dégager du gaz carbonique sans produire d’alcool. Dans un cellier, ce phénomène était redouté par les vignerons. Ils l’appelaient « la maladie du vin » car il en détériorait le goût.
Tandis que, dans les années 1970, les maisons de Champagne, jusqu’alors familiales, commencent à changer de mains, l’arrivée des scientifiques permet de voir apparaître de nouvelles connaissances.
Les spécialistes découvrent que cette maladie est en fait une dégradation de l’acidité. À une température dépassant 20 degrés, des bactéries contenues dans la lie modifient l’acidité du vin. L’acide malique (malus signifiant « pomme » en latin), apporte des qualités aromatiques et gustatives au vin. Dégradé par les bactéries, cet acide se détériore et devient lactique. Toutes les qualités de fruit s’échappent alors dans les bulles du gaz carbonique. Afin de lutter contre la maladie du vin, ils pratiquent la fermentation malolactique, qui se généralise en champagne. Lanson préfère ne pas l’utiliser, estimant qu’elle modifie le goût du vin.
Toutes les cuveries de l’entreprise sont climatisées pour éliminer les risques d’apparition de la bactérie. Parallèlement, les vins sont gardés plus longtemps en cave, soit deux ans de plus que la durée imposée par les prescriptions légales. L’acidité diminue ainsi avec le temps, mais les qualités essentielles du nectar sont préservées, permettant de proposer des vins de caractère, plus vifs, riches de toute la typicité du fruit.

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UN PASSE MOUVEMENTE

Maîtriser l’effervescence du champagne a été une tâche ardue dans laquelle les moines ont joué un rôle primordial.

La vigne existe en Champagne depuis des siècles. « On a retrouvé de la vigne fossilisée, relève Jacques Dabère, direction d’exportation Lanson Europe. Pendant l’occupation romaine, les Romains en ont arraché. Ainsi, non seulement les soldats buvaient moins et étaient plus performants, mais la population était également obligée de commander son vin à Rome! Par la suite, dans la région, les paysans ont continué à faire du vin. Mais l’activité principale a longtemps été la laine et les légumes. Le vin, lui, était destiné à la consommation locale. »
Pourquoi aussi peu d’engouement pour le vin de Champagne? Parce que celui-ci possédait un défaut redoutable. La première fermentation avait lieu en plein air, permettant au gaz carbonique de s’échapper. Mais, en travaillant, le vin produisait une seconde fermentation au printemps, cette fois en bouteille. Cette effervescence était considérée comme un défaut technique de taille puisque ni les flacons, ni les tonneaux de l’époque ne résistaient à ce phénomène. « Ce sont les moines qui ont trouvé la solution, explique Jacques Dabère. Ces gros propriétaires terriens, dont les monastères représentaient des centres de savoir, ont travaillé sur la maîtrise de cette seconde fermentation sauvage. Ils ont découvert que l’astuce, pour la contrôler, résidait dans l’assemblage. Assembler des raisins venus de différents points de la région a permis d’obtenir une fermentation moins violente. Ils l’ont apaisée. »

Champagne sanglant

Considéré comme une curiosité, ce vin effervescent voit son image se construire au fil des siècles. Sa rareté en fait le préféré des rois de France dont la plupart sont sacrés à Reims. Au début du 18e siècle, la maîtrise de la deuxième fermentation permet au breuvage d’amorcer un virage important. Mais ce n’est qu’au 20ème siècle que le Champagne tel qu’il est connu aujourd’hui gagne ses lettres de noblesse. Les vignerons fournissent alors leur vin à des négociants. Et la toute-puissance du négoce provoque une situation tendue.
« Au début des années 1920 ont eu lieu des émeutes graves à cause de cette situation, déplore Jacques Dabère. L’armée est intervenue, et il y a eu des morts. Finalement, en 1923, un accord a été signé définissant l’aire d’appellation Champagne. Il a marqué le début d’une véritable reconnaissance. À partir de là, le champagne a permis aux gens de gagner leur vie. »
Depuis, le produit n’a plus arrêté de prospérer. De 15 millions de bouteilles vendues en 1900, le champagne est passé à 40 millions peu avant la Deuxième Guerre Mondiale, à 50 millions entre 1960 et 1970, et à 300 millions de nos jours, toutes maisons confondues. Dans ce marché juteux, la maison Lanson vend aujourd’hui 7 millions de bouteilles par an.
« L’image du champagne n’est pas celle d’un vin ou d’un alcool, termine Jacques Dabère. C’est un produit à part entière, qui symbolise un moment d’exception, la volonté de se faire plaisir, et une certaine culture. « 

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DEBOUCHER ET SERVIR

Une bouteille de champagne ne s’ouvre pas comme une bouteille de vin traditionnelle. L’effervescence du vin peut réserver de mauvaises surprises si certaines précautions ne sont pas prises. La première étant, bien sûr, de ne pas secouer la bouteille. Une fois que vous avez ôté le muselet, gardez la main sur le bouchon et évitez de le diriger vers une personne ou des objets précieux. La bouteille contient une pression de 4 à 6 bars, comparable au double de celle qui se trouve dans un robinet. La meilleure façon d’éviter un accident est de pencher votre bouteille à 45 degrés afin d’augmenter la zone de dégazage. Maintenez fermement le bouchon, et tournez la bouteille afin que le bouchon se décolle sans se fendiller. Une fois décollé, il sortira de lui-même du goulot.

Le champagne doit être respecté jusqu’à la dernière seconde. Si vous souhaitez proposer un brut sans année, servez-le à une température de neuf degrés afin qu’il soit consommé à 10 degrés. Si vous lui préférez un vin plus mature, celui-ci doit être servi à la température de la cave dans laquelle il était entreposé. Maintenez-le dans une ambiance comprise entre 11 et 13 degrés.
Pour rafraîchir votre champagne, vous pouvez poser votre bouteille dans un seau rempli d’eau et de glaçons. Il lui faudra une quinzaine de minutes pour se trouver à bonne température. Vous pouvez également coucher la bouteille dans la partie inférieure de votre réfrigérateur où elle atteindra sa température optimale en trois quarts d’heure, à condition bien sur qu’elle soit issue d’une cave fraîche. Attention: ne buvez jamais un champagne glacé, cela perturberait la perception de ses arômes.

Enfin, ne servez pas votre champagne dans une coupe, mais dans une flûte galbée. Pour que celle-ci permette au vin de s’exprimer pleinement, elle doit idéalement avoir la forme d’une tulipe allongée. Et oubliez définitivement la légende expliquant qu’il suffit de d’introduire une petite cuillère à l’envers dans le goulot d’un flacon ouvert pour qu’il se conserve au réfrigérateur…

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LES DIFFERENTS CHAMPAGNES

Pour être satisfait de votre champagne, il faut apprendre à le choisir. Jeune ou vieux, brut ou millésimé: comment s’y retrouver?

Tous les vins de Champagne s’épanouissent dans les caves de leurs élaborateurs, entre 15 mois et 3 ans minimums pour les millésimés, et beaucoup plus longtemps pour les cuvées spéciales. Le temps enrichit les arômes du vin.


- Entre 15 mois et 3 ans, ils sont considérés comme jeunes, et expriment des notes de fleurs blanches, d’agrumes, de fruits frais.


- De 3 à 5 ans, les champagnes sont matures. Les arômes dominants sont alors ceux de fleurs capiteuses, et de fruits mûrs et confits.


- Dès 5 ans, les vins sont dits « de plénitude » et expriment les fleurs séchées et les arômes grillés.

Chaque dénomination (champagne brut, millésimé, rosé, blanc de blancs, cuvée spéciale) propose un vin très différent correspondant à des choix de vinification précis lors des trois étapes clés de sa fabrication :

- L’assemblage va largement déterminer la typicité du vin et sa palette de saveurs. L’assemblage, en Champagne, se pratique à trois niveaux: l’assemblage de crus, l’assemblage de cépages, l’assemblage d’années.
- Le dosage permettra au vinificateur, 
à la fin du vieillissement, d’éliminer le dépôt et d’ajouter un mélange de sucre et de vin. Cette touche, différente selon les vins, va établir une échelle du moins au plus sucré, ultra brut, extra brut, extra dry, sec, demi-sec et doux.
- La maturation,

pour un champagne, peut aller de 15 mois à 5 ans et plus. Avec l’âge, les arômes évoluent, de notes simples à complexes, de notes superficielles à profondes, de notes nettes à fondues.

MILLESIME, CUVEE DE PRESTIGE… QU’EST-CE QUE C’EST?

- Millésimé: lorsque une vendange est remarquable, la décision peut être prise de réaliser un vin millésimé. Un Champagne millésimé sera donc toujours marqué par le caractère de son année.
- Non-millésimé: la tradition champenoise veut que l’on assemble des vins de plusieurs années. Chaque année, une partie de la vendange est mise en réserve, destinée à être utilisée dans les futurs assemblages. Avec ces vins de réserve, l’élaborateur parvient à perpétuer le goût et le style de son Champagne. L’assemblage dit « non-millésimé » est celui où s’exprime le style de chaque maison et de chaque producteur.
- Blancs de blancs : ces vins de Champagne issus uniquement de Chardonnay se caractérisent par leur finesse.
- Blancs de noirs : élaborés uniquement à base de Pinot noir et/ou de Pinot Meunier, ils donnent des vins plus charpentés.
- Les champagnes rosés sont le plus souvent obtenus en assemblant des vins blancs et rouges. Ils peuvent varier du rose tendre au rose profond et leurs goûts, du plus léger au plus charpenté.
- Les cuvées spéciales ou de prestige représentent les perles des maisons de Champagne. L’assemblage est alors un parti pris encore plus affirmé. Pour les réaliser sont utilisés des grands crus, des millésimés, des mono-cépages, des vins à longue maturation, etc.
- Le champagne se décline dans toute une palette de couleurs

allant de l’or pâle à l’or vert, du jaune or à l’ambré, du vieil or à l’or gris. Ces nuances correspondent aux choix d’assemblages et de maturation. Un vin léger est clair, un vin puissant plus foncé. Il prend de la couleur au fur et à mesure de sa maturation.

Quant au prix, un bon champagne peut se trouver dès 30 à 40 francs la bouteille, si vous prenez le temps de chercher, et de suivre les conseils de bons cavistes. Pour les épicuriens fortunés certaines grandes cuvées de prestige, issues de Maisons renommées, se vendent plus de 600 francs…

TROIS CEPAGES, TROIS CARACTERES
Trois cépages sont utilisés sur l’appellation : le Chardonnay, cépage blanc, apporte de la finesse, de l’élégance et de la fraîcheur au vin. Le Pinot noir, cépage noir aux arômes de fruits rouges, amène de la richesse et de la puissance. Le pinot Meunier, autre cépage noir, se caractérise par sa souplesse dans les assemblages, il apporte une touche fruitée et permet de lier les qualités dissemblables du Chardonnay et du Pinot noir.

VINS TRANQUILLES DE CHAMPAGNE
La Champagne viticole se divise en cinq régions ayant chacune un encépagement et des conditions naturelles propres : la Montagne de Reims, la Vallée de la Marne, la Côte des Blancs, la Côte de Sézanne et la vallée de l’Aube. Il existe trois appellations en Champagne: le Champagne, les Coteaux champenois, et le Rosé-des-riceys.
Tous les vins de Champagne ne sont pas pétillants. Il existe un petit volume de vins blancs et rouges dits « tranquilles », vinifiés sous l’appellation Coteaux Champenois. La qualité de ces vins est extrêmement variable, mais quelques producteurs de renom, sur les meilleurs terroirs, produisent des vins rouges d’excellente facture. Par ailleurs, au sud de l’appellation, un vin rosé issu de pinot noir, capable de vieillir 5 à 10 ans, est élaboré. Ce vin rare appelé Rosé-des-Riceys, est considéré comme étant l’un des meilleurs rosés de France. Doté d’un cahier des charges sévères, il n’est pas produit systématiquement chaque année. La vigne ne se conduit pas n’importe comment, en Champagne. Les règles de cultures et d’élaboration y sont strictes, depuis la conduite de la vigne jusqu’à la vendange, le pressurage, etc.

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BIEN LIRE UNE ETIQUETTE

L’étiquette apporte les indications suivantes:

- L’appellation Champagne.
- La marque ou le nom de l’élaborateur
- Le dosage : brut, sec, demi-sec…
- Les particularités : Blanc de Blancs, Blanc de Noirs, rosés, millésimé, cuvée spéciale.

La contre-étiquette, elle, donnera d’autres informations telles que les cépages entrant dans l’assemblage, la maturation, la description des arômes et des suggestions d’accords avec les mets.
Trois types de maisons se partagent le marché: les maisons de négoce, les Caves Coopératives et les récoltants indépendants. L’étiquette de champagne porte souvent, en petits caractères, un code généralement composé de deux lettres. Il indique qui a mis le vin en bouteille.
Ainsi :
- N-M veut dire Négociant Manipulateur (qui achète le raisin et le vinifie dans ses caves)
- R-M: Récoltant-Manipulant (vigneron vinifiant sa propre récolte dans ses caves)
- RC: Récoltant-Coopérateur (vigneron membre d’une coopérative dont il vend le vin sous son nom)
- CM: Coopérative de Manipulation (coopérative qui produit et élève son vin dans ses caves à partir du raisin de ses membres)
- SR: Société de Récoltants (association de vignerons indépendants qui produit le champagne à partir de la récolte de ses membres)
- ND: Négociant Distributeur (négociant qui achète du champagne en bouteille et y appose ses propres étiquettes)
- R: Récoltant (vigneron qui fait vinifier ses raisins par un négociant manipulant et récupère son champagne en bouteille)
- MA: Marque d’Acheteur (désigne une marque produite sur commande pour un acheteur, sous sa propre étiquette).

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LES FLACONS

Des repas en tête-à-tête aux grandes fêtes entre amis, le champagne peut être proposé dans des flacons de différentes contenances:

Quart: 18,75 cl
Demie: 37,5 cl
Bouteille: 75 cl
Magnum: 1,5 litre (2 bouteilles)
Jeroboam: 3 litres (4 bouteilles)
Réhoboam 4,5 litres (6 bouteilles)
Mathusalem: 6 litres (8 bouteilles)
Salmanazar 9 litres (12 bouteilles)
Balthazar: 12 litres (16 bouteilles)
Nabuchodonosor 15 litres (20 bouteilles)
Et plus rarement, on rencontre encore:
Salomon 18 litres (24 bouteilles)
Primat 27 litres (36 bouteilles) mais non homologué officiellement

Martine Bernier

PS: Alors, Thierry? Ton verdict?

Le coup de foudre coloré

22 octobre, 2009

Ce soir, dans mon club où, contrairement à ce qu’en pensent certains, (enfin… un « certain » en particulier!) on ne se gave pas de petits fours en buvant du champagne, il a été beaucoup question de la Roumanie.
La Roumanie, un pays auquel j’ai consacré trois ans de ma vie, entre 1989 et 1991.
J’en garde un bouquet de souvenirs. Mais parmi eux, il y a eu ce qui est resté pour moi un choc visuel exceptionnel.

Nous étions sur une route cabossée, en pleine campagne, en direction de Rimnicu Vilcea où j’étais attendue.
Devant nous, un camion un peu déglingué a perdu l’équilibre en passant dans une ornière, et s’est renversé sur le bas côté.
Et là… les portes arrières se sont ouvertes, et une multitude d’oranges ont roulé dans le pré.
Ces fruits roulant dans cette herbe très verte, c’était une vision quasiment féerique.
J’avais vu que le chauffeur était sorti indemne de son véhicule, et je n’arrivais pas à détacher mon regard de ce spectacle.
Cet orange et ce vert, le contraste entre ces deux couleurs pour lesquelles la main de l’homme n’est pas intervenue, était saisissant.
Nous sommes restés sans bouger, captivés, à regarder…
Et tout à coup, sortie je ne sais d’où, une myriade d’enfants est arrivée en courant et en criant.
Ils ont couru vers les oranges, et les ont ramassées avant de disparaître aussi vite qu’ils étaient venus.
Seuls quelques-uns d’entre eux restaient là, les fruits en main, à les regarder un peu perplexes.
Mihaïl, mon ami musicien qui m’accompagnait, m’a dit: « Ils ne savent pas ce que c’est, ils n’en ont jamais vu ».
Le spectacle de ces gamins retournant les oranges dans leurs mains sans savoir s’il s’agissait d’un jouet ou d’un aliment… c’était fascinant.

J’ai des souvenirs très précis des conditions effroyables dans lesquelles vivaient les enfants parqués dans les orphelinats, ceux-là même qui s’accrochaient à moi pour que je les emmène.
Les odeurs repoussantes, la saleté, le manque de soins, le désespoir de ces gosses perdus, dont personne ne se préoccupait vraiment.

La Roumanie, juste après Ceausescu, m’a ravagé le coeur.
Et puis il y avait ces couleurs à couper le souffle.
J’étais là pour les enfants, pour les amis que je me suis faits sur place.
Mais on ne se refait pas, l’art, la peinture, me touchent quelle que soit la partie du monde où je me trouve.
Et là… je garde encore au fond des yeux le bleu si particulier de certaines icônes et de certains vitraux.
Un bleu profond, intense, magique.
Mes amis, grâce à leurs relations, me permettaient d’entrer dans des lieux qui n’étaient pas ouverts aux étrangers.
C’est là que j’ai vu les plus beaux trésors de l’art roumain.
Des icônes d’une valeur inestimable si l’on tient compte de leur ancienneté, de leur beauté.
Les voir, jalousement surveillées par des pops dont les regards devenaient tendres lorsqu’ils se posaient sur les oeuvres dont ils avaient la garde a été un privilège inoubliable.

M.B.

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