Archive pour septembre, 2010

Google innove

11 septembre, 2010

A l’instar de Lucky Luke, qui tirait plus vite que son ombre, Google veut désormais aller plus rapidement que la frappe de l’internaute.
Le 9 septembre 2010, le célèbre moteur de recherche a annoncé le lancement de Google Instant, déjà en version d’expérimentation depuis le mois d’août auprès de certains utilisateurs.
En résumé, vous voyez s’afficher les résultats de votre requête au fur et à mesure que vous la saisissez sur votre clavier.
Le credo des créateurs de cet « outil de prédiction de requêtes » digne d’un Nostradamus des temps modernes est le suivant: « les gens tapent lentement mais lisent beaucoup plus vite ».

CQFD!

Ils vont même plus loin, nous expliquant que le « temps écoulé entre deux frappes de clavier sur le moteur et de 300 millisecondes, alors que les yeux des internautes passent d’une zone de page à une autre en 30 millisecondes. »
Le plus sérieusement du monde, Google nous explique, avec un aplomb rigolo, qu’il va réduire le temps passé sur son moteur de recherche, ce qui fera économiser à l’internaute entre deux et cinq secondes par recherche.

Chic… Avec tout ce temps économisé, j’ai calculé que, dans 120 ans, je pourrai profiter de ce temps économisé pour m’offrir une semaine de vacances supplémentaire.

Merci, Google!

Martine Bernier

Le contrat avec Lourdes… ou les mystères des conversations féminines

10 septembre, 2010

Ce vendredi matin jour de bonne humeur en prévision du week-end qui commençait le soir, je me suis accordé un moment de répit dans mes écritures et mes préparatifs en retrouvant Béa, mon amie de là-bas, sur MSN.

Messieurs qui vous demandez de quoi parlent les femmes lorsqu’elles sont entre elles, le voile va se lever exceptionnellement pour vous sur ce grand mystère féminin…
Nos conversations sont hautement intellectuelles et philosophiques.

Preuve par l’exemple.

Béa m’explique qu’elle est sur le site de la boutique M6.
La courte conversation qui a suivi, dont voici un extrait, est un morceau d’anthologie:

- Tu veux t’acheter une chaise longue amphibie, vu le temps que tu me décris chez toi?
- Non, je n’achète rien, mais ils font tellement bien leur pub que tu finis par croire aux miracles!!!
- Ah oui, du genre perdre 12 kg en quatre millièmes de seconde, ou ne plus avoir une ride après s’être appliqué une tartine de confiture Miraculus sur le visage?
- Voilà, c’est cela, tu as tout compris!! Et tu « briques » ta maison avec un aspirateur qui sait tout faire!
- Ils n’auraient pas une machine à nettoyer les moquettes?
- En cherchant bien… si, justement, ils appellent cela « appareil vapeur malin », et, en plus, il repasse!! Je te dis, ils ont un contrat avec Lourdes! Attends… Maintenant, c’est le corsaire minceur… tu mets la gaine et tu maigris!!! C’est du latex!!! Bonjour l’odeur!!! La dame a perdu dix centimètres et l’autre a fondu! Super, j’en veux deux pour Noël, une pour le haut et une pour le bas.
- Le Retour de la Momie…

Je retourne à mon article en riant.
Béa est l’une des femmes les plus drôles que je connaisse.
Son humour totalement disjoncté et son rire proche de celui de « Ma Sorcière Bien-Aimée » la rend parfaitement irrésistible.

Elle ce matin, Thierry hier soir, Fred la veille, Aurore quasi chaque jour: ma Terre de Sel est à portée de coeur.

Martine Bernier

Bonne nouvelle: les pressions de l’administration américaine ont fait céder le fameux pasteur Jones qui renonce à brûler le Coran pour le neuvième anniversaire des attentats du 11 septembre.
Comme quoi, l’administration a son utilité…

Brûler le Coran? Mais enfin!!!

9 septembre, 2010

Il faut reconnaître que, parfois, l’actualité a le don de receler des nouvelles étonnantes.
Celle révélée ces dernières heures ne m’a pas fait rire du tout.

Aux Etats-Unis, un pasteur évangéliste n’a rien trouvé de mieux, donc, que d’annoncer publiquement son désir de brûler des exemplaires du Coran pour marquer l’anniversaire des attentats du 11 septembre.
Voilà qui devrait contribuer à détendre l’atmosphère, tiens!

Otez-moi un doute….
Un pasteur, fut-il évangéliste, n’est-il pas censé être un homme d’Eglise pétri de bonté et de tolérance, saupoudré d’un zeste d’intelligence?
Terry Jones, très fier de son idée a, paraît-il, reconnu en interview qu’il sait que son geste va offenser les musulmans, mais « qu’il ne faut pas reculer devant les dangers de l’Islam ».

Oui, oui…

Il est clair qu’il va contribuer à faire avancer le schmilblik, tiens…
A la Maison-Blanche, on se dit préoccupé, craignant pour la sécurité des soldats en Afghanistan.
L’OTAN a réagi, l’ONU s’inquiète, le Vatican s’insurge et Al-Azhar, institution faisant référence dans le monde sunnite, prévient que ce geste serait lourd de conséquences.

Mais ce brave Terry n’en a cure, sans jeu de mots.
Il paraît que sa déclaration pleine de fantaisie fait suite à la polémique entourant le désir de certains d’ériger une mosquée près de Ground Zero, où a eu lieu le drame du 11 septembre.
Ce sont les islamistes radicaux qui doivent être contents devant les déclarations irresponsables du pasteur.

Martine Bernier

Amélie Nothomb: »Une forme de vie »

8 septembre, 2010

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Je l’ai déjà dit: ses livres, je les ai tous lus.
Au début avec scepticisme, puis avec délectation.
Je les ai pratiquement tous aimés.
Il n’était donc pas question que je manque le dernier, que j’attendais avec impatience, faisant partie des inconditionnels de cet écrivain attachant.

« Une forme de vie », tout le monde en parle ou en a parlé.
Une lettre arrive un jour chez Amélie Nothomb, provenant d’un certain Melvin Mapple, soldat américain en Irak.
Melvin souffre de ce qu’il vit et, comme certains de ses collèges, a trouvé un réconfort dans la nourriture.
Il mange… mange tellement qu’il est devenu obèse.
Une correspondance s’instaure entre lui et celle qui est son auteure préférée.

J’aime le style d’Amélie, sa réflexion, le chemin de mots qu’elle utilise.
Certains ont critiqué l’ouvrage, estimant qu’elle y faisait preuve d’un auto encensement.
Ce n’est pas ainsi que je l’ai ressenti.
Je la crois beaucoup plus claire, plus pure que ceux qui lui prêtent ce genre de sentiment.
Son livre est étonnant, sensible, surprenant, inattendu sur la fin.
Alors que l’on croit s’être installé dans le train de l’histoire, elle bifurque brusquement.
Impossible de se lasser.

A travers ces pages, l’auteure en profite pour expliquer, en douceur, certaines règles de savoir-vivre à celles et ceux qui lui écrivent.
Elle est connue pour répondre à son courrier personnellement.
Certains en profitent outrageusement…

J’aime cet écrivain, et je crois que j’aime cette femme dont les interviews me touchent.
Comme d’habitude, son livre est en tête des ventes depuis sa sortie.
Et comme très souvent… je trouve qu’elle le mérite.

Martine Bernier

« Une forme de vie », Amélie Nothomb, Albin Michel

Mon facteur…

7 septembre, 2010

Au cours de ces dernières années, alors que j’habitais encore dans le canton de Vaud, j’avais un facteur que j’aimais beaucoup.
Lorsqu’il a commencé à entrer dans ma vie, il n’avait pas trente ans.
Frédéric était grand et costaud, très doux, gentil, souriant.
Petit à petit, nous avons appris à nous connaître, à nous apprécier.
Il aimait bien me monter mon courrier et venir me faire un brin de causette.
Il me parlait de son épouse, qu’il adorait, de sa petite fille.
Un jour cette dernière est tombée gravement malade.
Il est venu se confier, m’a expliqué les longs traitements, l’angoisse…
Jamais il ne se plaignait, il restait toujours optimiste, d’humeur égale.
Je l’écoutais, je saluais leur courage, à lui et à sa femme, je lui ai donné des livres pour sa petite fille.
Lorsque j’ai quitté la Suisse pour partir en Bretagne, nous nous sommes dit au-revoir.

Au mois d’août dernier, alors que nous étions en voiture, en route pour un reportage, Eric m’a demandé le nom du facteur avec lequel j’avais eu une si jolie relation.
Je le lui ai dit et lui ai demandé pourquoi.
Il m’a répondu:
- Je crois qu’il est décédé…

J’ai eu un tel choc que je suis restée sans voix.
Il avait 34 ans.
Une maladie épouvantable… et un départ totalement injuste.
Cette nouvelle m’a fait très mal.
Je suis rentrée en contact avec son épouse qui doit désormais faire face seule.

Un tel drame me bouleverse.
Je repense à la chanson de Moustaki, « Le facteur ».
Je la dédie à ce jeune homme qui manque à tous ceux qui ont pu le côtoyer et qui était simplement un adorable humain…

Martine Bernier

Week-end: la fin de la disgrâce

6 septembre, 2010

Je pense que vivre, c’est venir au monde à plusieurs reprises.
Naissance ou résurrection?
Non… il doit bien exister un troisième mot dans mon cas…
Je cherche.
La renaissance d’un être qui n’est pas intact, plus fragile, plus sauvage, moins confiant, fuyant les prédateurs.
Plus attentif, plus sensible encore à la valeur réelle de ceux qui l’entourent.
Et infiniment reconnaissant à ceux qui ne lâchent pas sa main, authentiques, sincères et solides.
Amis ou amour.

Pendant des années, j’ai détesté les week-end.
J’avais d’ailleurs consacré un texte au sujet.
Il a suffi qu’un Géant aux yeux étranges et beaux accorde son pas sur le mien pour que je révise ma position.
Pour des raisons professionnelles, nous sommes séparés géographiquement pour encore quelques mois.
Mais les week-end nous permettent de nous retrouver.
Et nous avons tellement de projets, d’envies de lieux à découvrir, à hanter, d’escapades programmées, que l’agenda risque bien de se remplir pour plusieurs mois…
Ces fins de semaine qui me semblaient interminables sont devenues les journées les plus courtes.
Des journées où le temps s’emballe.
Dès le vendredi soir, chaque minute est soignée, dorlotée.
Tout est mis en place pour que chaque instant soit habité, rendu inoubliable.
La magie, c’est le choix des mots, la délicatesse des termes, des gestes.
C’est un art à glisser dans chaque heure pour éviter l’habitude et la poussière du temps.

Lorsqu’Il est là, notre vie est riche.
Nous nous réservons du temps, nous sortons, nous rencontrons des gens que nous aimons.
Sa personnalité est forte et attachante, il est apprécié.
Et le Temps s’emballe…

Dimanche soir, nous n’avons pu répondre à une invitation: la route qui menait à Evian était fermée pour trois jours, il n’était pas possible de s’y rendre autrement qu’en faisant un détour énorme nous faisant traverser les deux tiers de la Romandie.
Partie remise à la semaine prochaine.
Nous avons décidé d’aller dîner au bord du lac, à un jet de pierres de chez moi.
La serveuse nous reconnaît déjà, se souvient de notre façon de fonctionner.
Notre table était si proche de l’eau que nous pouvions jeter notre pain aux canards et entendre le clapotis des vaguelettes à nos pieds.
J’ai une conscience profonde de la chance qui nous est donnée de vivre des moments aussi privilégiés dans de tels endroits.
La beauté du Léman m’a permis de supporter l’absence de l’Atlantique, qui me manque pourtant toujours.
J’aime l’eau, il préfère la montagne.
Dans cet écrin naturel, nous profitons des deux paysages.
La nuit est tombée doucement…
Tout était paisible.
Un moment hors du temps.

Tout change lorsqu’il déserte l’appartement.
La cuisine se rendort, oublie pour quelques jours les parfums et les saveurs, les petits plats qu’il y mijote d’un air attentif et sérieux.
Il ne fait plus irruption dans la pièce où je travaille, affichant un air modestement triomphant en apportant une casserole de pêches de vigne cuites pour me les faire goûter devant mon clavier…

Pomme se languit des jeux qu’elle partage avec lui, parcourt l’appartement en traînant les pattes d’un air nostalgique.

Dans mon bureau, la chaise qu’il a posée dans un coin attend près de la fenêtre qu’il revienne s’y installer avec un livre, interrompant de temps en temps sa lecture pour me regarder écrire.
Mon regard se pose sur les objets et les affaires personnelles qu’il a semés dans chaque pièce pour me rappeler qu’il reviendra.
Dans la chambre, son chapeau patiente, posé sur l’armoire.
Hormis le fouet (je n’apprécierais pas!), il a le look d’Indiana Jones, mon Géant.
Un look qu’il n’a pas étudié, qui lui est aussi naturel qu’il peut l’être au quotidien, et qui convient à son physique de baroudeur.
Un physique qui correspond à la vie qu’il a menée.

Entre mes livres et mes objets, s’intercalent désormais des touches de vie différentes.
Il prend sa place, doucement.
Et me fait rire…
Posant une bouteille d’eau-de-vie sur un secrétaire, à côté d’un « pleurant » copie conforme de ceux du Moyen Age, et s’extasiant devant la beauté du flacon… avant de le retirer à toute vitesse, en souriant devant ma réaction consternée.
Sacrilège!!!

Trois heures et demie du matin, le réveil sonne.
Il doit partir à 4 heures pour reprendre son poste au matin.
La route est longue…
Depuis le balcon, je regarde sa voiture s’enfoncer dans la nuit.
Je sais qu’il est aussi triste que moi.
Pomme gémit, elle ne comprend pas.
Elle s’est attachée à celui qu’elle semble prendre pour un immense jouet vivant qu’elle adore provoquer, dont elle défie l’autorité, et avec lequel elle sort se balader sans se faire prier.
Elle paraît minuscule lorsqu’elle trottine à côté de lui.
Et si triste lorsqu’il s’en va.

La voiture s’arrête devant le balcon d’où je guette son passage en grelottant.
Derniers mots à voix basse pour ne pas réveiller le voisinage, derniers gestes, derniers regards.
La lueur des phares s’éloigne dans l’obscurité.
Pas moyen de me rendormir, je me mets au clavier et j’écris.

Martine Bernier

Les Ombres continuent à envoyer leurs messages se moquant d’Alain et de Blanche-Neige autant qu’ils le peuvent.
Soyez gentils de m’oublier.
Je sais ce qu’il est, ce qu’ils sont, je l’ai déjà dit.
Je n’ai pas besoin que vous me le rappeliez.
La nausée ne passera jamais.
Laissez-moi cicatriser.

Ignace de Loyola et le grand virage

5 septembre, 2010

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Chacun d’entre nous possède son propre Panthéon de personnalités que nous admirons ou qui nous intriguent.
Il y a deux jours, dans la conversation, mon compagnon m’a dit: « Tu ne connais pas Ignace de Loyola? »
Il paraissait surpris.
J’avoue humblement que les seules références liées au prénom d’Ignace évoquent pour moi une très vieille religieuse qui tenait le rôle de pion pendant nos heures d’études, à l’école, ou l’air angélique de Fernandel quand il jouait au benêt de service…

Donc, non, j’avoue, je ne connaissais pas vraiment ce monsieur.

Comme Il n’a pas pour habitude de s’extasier devant le premier venu, je me suis penchée sur le sujet durant ses heures de sommeil.
Je comprends que le début de la vie du personnage ait pu séduire un ancien militaire de carrière…
Né au Pays Basque espagnol le jour de Noël de 1491, cadet d’une famille de treize enfants (pensée compatissante au passage pour la maman…), celui qui fut baptisé Inigo arrivait dans le monde par la porte de la petite noblesse.
Orphelin de mère à 7 ans, il développe une belle relation avec son père et bénéficie d’une éducation sérieuse.
En 1506, il devient page de Cour, puis secrétaire, gentilhomme et vit durant dix ans au sein de la Cour d’Espagne, proche de la princesse Catalina, soeur de Charles-Quint.
En 1517, il entre dans l’armée et participe à des batailles mémorables. Mais une blessure, dont il gardera comme séquelles une jambe devenue plus courte que l’autre, lui interdit de réintégrer l’armée.

C’est là, à mon sens, que la vie d’Ignace devient étonnante.
Tandis qu’il est convalescent, il se distrait en lisant.
Et comme il ne trouve aucun livre de chevalerie à se mettre sous la dent, il se rabat sur les ouvrages religieux.
C’est pour lui une révélation.
Sa vie va prendre un virage à 180 degrés.
Dans ses rêves, il voit apparaître la Vierge mère, et se met à concevoir un rejet prononcé pour la vie qu’il a menée.
Le métier des armes, son attirance pour les femmes lui font désormais horreur: il veut devenir ermite.
Le brave homme.
Le nouveau but de sa vie devient la conversion des « infidèles » musulmans, en Terre Sainte, et il part de pèlerinage en pèlerinage.
Convertir plutôt que tuer ou faire prisonnier… son esprit de conquistador n’est pas calmé.
A Jérusalem, il se confesse, troque ses armes contre une robe de bure et retourne en Europe où il devient ermite ascétique.
Par la suite, il fera plusieurs voyages à travers le monde, mais l’intérêt de son existence est autre.

Pendant onze ans, il va étudier, la philosophie, la théologie, devient un érudit, adoré par les uns, controversé par d’autres.
Des étudiants le suivent, il enseigne par l’exemple une foi marquée par sa rigueur naturelle: il assume la discipline, la pauvreté et la chasteté… et crée la Première Compagnie de Jésus ou l’Ordre des Jésuites.
Il laissera de nombreux écrits qui ont accompagné ses descendants spirituels sur leur chemin.

Je ne suis pas sûre que la trajectoire d’Ignace de Loyola me séduise.
Les Jésuites ont fait de bonnes choses, et d’autres, moins bonnes.
Mais je comprends que l’on puisse être troublé par le changement de vie magistral qu’il a adopté.

S’il ne me trouble pas spécialement, Celui qui m’en a parlé, Lui, m’intrigue de plus en plus.

Quand je lui ai dit que je me suis documentée sur cet homme et que je ne comprenais pas vraiment pourquoi il l’admirait, il a souri et a plongé sur moi ce regard si particulier qui est le sien:
- Mais… qui t’a dit que je l’admirais?

Martine Bernier

Pauvre Belgique…

4 septembre, 2010

Ils vont finir par la faire exploser, cette petite Belgique… et c’est bien ce qu’ils avouent vouloir les partis neerlandophones purs et durs…
Hier, nous apprenions que « le chef du parti socialiste francophone, Elio Di Rupo, pressenti pour devenir premier ministre, a jeté l’éponge après le rejet par le principal parti de Flandre, le mouvement indépendantiste N-VA, d’une ultime proposition de compromis. »
L’un de mes amis Belges venait de me dire l’inquiétude qui naissait une fois encore dans le pays suite à l’échec de la mission d’Elio Di Rupo.
J’ai suivi la page spéciale consacrée à l’événement sur le site de la RTB (Radio Télévision Belge).
Il était très clair que le pays nage en plein chaos.
La conférence donnée par Di Rupo était très attendue.
Je l’ai suivie en direct et j’ai trouvé ses propos très cohérents.
Il semblait vraiment que, avec son équipe et les autres partis présents, ils aient tout tenté pour mettre en place des mesures satisfaisantes pour les citoyens flamands qui demandaient, par voie de votation, « davantage d’autonomie, notamment financière, pour la Flandre ».
Mais deux partis, dont les Indépendantistes, ont refusé, faisant capoter la mission.
Elio Di Rupo a présenté sa démission au roi qui réserve sa décision pour l’instant.

Et moi, ignare en matière de politique belge qui fut pourtant mon pays de naissance, je songe…
Les partis ne sont-ils pas censés oeuvrer pour le bien de la population et du pays?
Là, clairement, deux d’entre eux souhaitent le mener à la cassure.
Pourquoi est-ce permis?
Comment peut-on accepter une telle chose sans rien pouvoir faire?
Est-ce vraiment ce que veulent leurs électeurs?
Mais que se passera-t-il après?

J’ai le coeur serré pour ce pays qu’aimait mon père.
Lui qui me racontait l’Histoire avec des mots presque tendres, mais durs quand il parlait des colonies.
Il abhorrait l’asservissement, n’aimait pas les conflits.
Mais il aimait son pays qu’il nous faisait visiter de long en large en apprenant les traditions.

Un des intervenants a relevé hier quelque chose de très révélateur.
Il a expliqué qu’après les dernières élections, les ministres ont dit qu’ils allaient « essayer de ne pas rater leur mission » plutôt de dire qu’ils allaient se battre pour réussir.

Y a-t-il encore quelqu’un pour croire assez en la Belgique, aujourd’hui, pour pouvoir la sortir de la crise?
Il le mérite pourtant, ce petit pays-là…

Martine Bernier

Mademoiselle Eha et les « travaux féminins »

3 septembre, 2010

Je n’ai jamais été très douée pour les travaux d’aiguilles.
Alors que je devais en effectuer un hier soir, j’ai repensé à l’une des personnes qui m’a le plus empoisonné l’existence alors que j’étais étudiante: Mademoiselle Eha.

J’ai eu le privilège (dont je me serais volontiers passé) de suivre ses cours durant plusieurs années, lorsque j’étais en humanités, comme on disait en Belgique à l’époque.
Je me souviens du jour où, très jeune adolescente, j’ai vu entrer dans la classe une femme élancée, rousse aux cheveux bouclés, vêtue à la mode des années 70, fleurie et colorée.
Je l’ai trouvée très belle, cette grande dame nerveuse au teint de pêche et… au caractère de cochon.

J’ai regardé sur la liste des cours quelle était la matière qu’elle enseignait.
Avec horreur, j’ai lu: « Travaux féminins », mademoiselle Eha.
« Travaux féminins »…
Ah bon? Il existait dont des travaux réservés exclusivement aux femmes?
Je ne le sentais pas, moi que l’on avait toujours considérée comme un garçon manqué.
Encore une ineptie d’adultes sectaires!

Joyeusement, Mademoiselle Eha nous a appris que nous allions, cette année, « réaliser un chien coussin et un pull en tricot ».
Chic.
A l’époque, je découvrais Nietsche avec délices, je passais mes nuits à lire Flaubert et Stendhal à la lueur d’une lampe de poche, sous mes draps, et je dévorais Pearl Buck et Sartre.
J’étais aux antipodes des chiens-coussin et des pulls en tricot…

La semaine suivante, brandissant une paire d’aiguilles à tricoter, Mademoiselle Eha a appris à la classe attentive comment faire « les points à l’endroit et les points à l’envers ».
D’emblée, cela ne m’a pas passionnée… et elle l’a remarqué.

- Mademoiselle, premièrement, vous ne pouvez pas monter des mailles en ayant les cheveux dans la figure. Vous allez me faire le plaisir d’aller les attacher, comme tout le monde. Deuxièmement il va falloir faire preuve d’un peu plus d’entrain, sans quoi nous n’allons pas nous entendre.

Sur 650 filles que comptait l’école, je devais être la seule à avoir toujours refusé de porter des nattes ridicules ou ces couettes à la Sheila, alors très en vogue. Cela m’avait valu quelques heures de retenue, mais je n’avais pas cédé.
Et je n’allais pas commencer.
Un bras de fer a débuté entre mon professeur et moi.
Je crois qu’elle aurait adoré me tordre le cou, mais qu’elle aurait eu trop peur de contrarier la directrice qui, même si elle me convoquait de temps en temps pour m’expliquer qu’il fallait apprendre à se plier aux règles, semblait s’amuser de mon côté pacifiquement frondeur.
J’opinais… et je ne cédais toujours pas.
J’estimais que j’étais là pour apprendre, pas pour être dressée.
Je ne pouvais le dire ouvertement.
Je l’exprimais donc à ma manière.

Au bout de plusieurs semaines, les pulls de mes camarades de classe ont commençé à prendre forme.
Le mien ressemblait à une serpillère informe et trouée, parsemée de mailles coulées, au grand désespoir de Mademoiselle Eha.

- Enfin, mademoiselle!!! C’est une « loque »! A quoi pensez-vous??? Si vous voulez trouver un mari, il vous faut apprendre à coudre un bouton et à tricoter!
- Mais… Je sais recoudre un bouton! Et je peux peut-être trouver un mari qui achètera ses vêtements tout faits?

Je ne me voyais pas passer ma vie à tricoter des pulls à longueur de journée.
C’était pour moi le comble de la misère intellectuelle.
Je n’aimais déjà pas les Blanche-Neige.
Comme je ne voulais pas faire de peine à Mademoiselle Eha, je suis allée voir ma grand-mère, tricoteuse émérite, et je lui ai expliqué le problème.
Navrée, elle a contemplé mon oeuvre avec consternation:

-Toi, ma petite, je ne sais pas ce que l’on va faire de toi. Laisse-moi ton pull et ton modèle. Je vais te l’avancer, et, en échange, tu viendras me faire mon ménage pendant 15 jours.

Le marché était équitable.
D’autant que ma grand-mère savait qu’avec un livre dans une main et un chiffon dans l’autre, je n’allais probablement pas être très performante.
La semaine suivante, je posais fièrement le pull sur le bureau de Mademoiselle Eha.
Elle a froncé les sourcils:
- Voulez-vous me faire croire que c’est vous qui l’avez fait?
- Non, vous ne me croiriez pas. C’est ma grand-mère. Elle est très douée et adore tricoter. Ca lui a fait plaisir de le faire, alors que pour moi c’était une corvée. Comme cela, tout le monde est content.

Elle m’a regardé, a pris le pull… et l’a entièrement détricoté.
En me tendant la pelote, vestige de l’oeuvre, elle m’a dit:

- Vous avez une semaine pour m’apporter ce que vous êtes capable de faire.

Rentrée chez moi, j’ai réfléchi.
Je ne voulais pas céder.
Elle m’avait demandé de lui apporter ce que j’étais capable de faire…
En classe, mon aventure avec mon professeur prenait des allures de feuilleton à suspens.
Tout le monde attendait la suite, y compris la directrice, Soeur Marie-Véronique, que la situation embarrassait beaucoup.
La semaine suivante, dans un silence de mort, je me suis avancée vers le bureau de Mademoiselle Eha qui, en même temps que mes camarades, attendait le moment fatidique.
Je lui ai tendu une vingtaine de feuillets en lui disant que je lui avais obéi et que je lui apportais ce que j’étais capable de faire.
Elle a commencé à lire, page après page, les reposant sur son bureau une à une.
Je n’ai pas bougé.
Quand elle a eu terminé, ses beaux yeux verts étaient remplis de larmes.
Elle m’a dit:
- Vous avez raison, vous m’avez obéi. Et ce travail-ci, vous le faites très bien. Allez vous asseoir.
Je lui avais écrit une dissertation sur les travaux dits féminins, sur le droit à la différence et sur la tristesse d’une élève consciente qu’elle ne pourra jamais satisfaire une femme professeur pour laquelle elle a pourtant de la tendresse.

Durant toutes les années que je l’ai eue comme professeur, Mademoiselle Eha ne m’a plus jamais ennuyée.
La dernière fois que nous nous sommes vues, alors que je quittais l’école pour d’autres cieux, elle m’a dit qu’elle ne m’oublierait jamais.
Moi non plus, je ne l’ai jamais oubliée.

Martine Bernier

Les Pralies en cadeau

2 septembre, 2010

J’ai déjà parlé, ici de Gabi, de la Ferme des Pralies, cette jeune femme sensible et pétillante que j’avais rencontrée pour un reportage, et avec laquelle le contact était passé de manière tout à fait exceptionnelle.
Hier, alors que je promenais Pomme au pas de charge avant de me replonger dans mes écritures, j’ai réalisé que le facteur avait déposé un gros colis dans ma boîte.
Perplexe, je l’ai extirpé de sa cachette en me disant que ce devait être des livres envoyés en service de presse.
Mais non…
Sur l’étiquette figurait le nom de Gabi.
En ouvrant le paquet, j’ai découvert une colonie de pots de confitures et de douceurs dont elle sait qu’elles figurent parmi mes préférés.
Une lettre accompagnait le tout, qui m’a émue presque aux larmes.
Elle avait joint également deux ou trois extraits des oeuvres culinaires de l’une de ses amies que j’avais rencontrée, Brigitte Streiff, coach culinaire à laquelle il faudra que je consacre un jour un texte, pour sa personnalité et son étonnante initiative.

J’ai essayé d’appeler Gabi deux fois, sans succès.
Ce matin, je découvrais qu’elle m’avait mis un message pour me laisser son numéro de portable.
Comme j’ai été bien élevée et que l’on ne dérange pas quelqu’un au saut du lit, je me suis empêchée de l’appeler avant une heure correcte.
Et j’ai retrouvé avec bonheur ce mélange de légèreté et de profondeur, d’humour et de pudique gravité qui la caractérisent.

J’ai la chance de pratiquer un métier magnifique, fait de rencontres et de découvertes.
Mais, avouons-le, même s’il m’arrive de garder contact avec certaines des personnes que j’interviewe, il est très rare que le journalisme me fasse cadeau d’une telle amitié…
La vie me gâte, depuis quelques temps…

Martine Bernier

La Ferme des Pralies: http://lafermedespralies.webnode.fr/
Brigitte Streiff: http://cookingcoach-romandie.com/index.html

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