Archive pour février, 2011

Le thé vert et l’acupuncteur

8 février, 2011

Lorsque vous avez un souci de santé sérieux, vous cherchez à compléter la ligne médicale de base par une médecine douce, souvent bien utile pour améliorer notamment les dégâts collatéraux imposés par le souci en question.
Voici quelques semaines, conseillée par l’un de mes médecins, j’ai pris rendez-vous chez un acupuncteur chinois réputé dans la région.
Il a suffi qu’il me prenne « les sept pouls » pour confirmer le diagnostic de ses collègues occidentaux et pour rajouter un ou deux éléments au dossier.
Quelques aiguilles plus tard, il posait un paquet de thé sur sur bureau à mon intention et m’annonçait solennellement:
- Vous allez boire plusieurs tasses de thé vert par jour.

Je l’ai regardé horrifiée.
- Pardon??

Pensant que je ne l’avais pas compris en raison de son accent, il a répété patiemment.
Comment expliquer à ce monsieur mon aversion pour le thé?
J’ai consacré des articles entiers à ce breuvage, j’en connais tout ce qu’il faut savoir, voire plus.
De là à l’avaler…. mission impossible.
La seule fois où, pleine de bonne volonté, je me suis prêtée à l’exercice sans y être forcée, c’est lorsque, enfant, j’avais vu Roger Moore en déguster dans un « James Bond ».
Sa classe naturelle m’avait donné envie d’essayer.
C’est à partir de ce moment-là que j’avais compris pourquoi 007 était un héros…
Oui, oui, je sais, les amateurs de thé l’adorent et seront peut-être choqués.
Que voulez-vous.. c’est ainsi…

- Il y a un problème?
- J’ai horreur du thé. D’autant que je sais que le thé vert est le plus amer.
Devant son air perplexe et déçu, j’ai ajouté:
- Mais si vous estimez que cela peut aider, je vais essayer.

Il m’a regardée, décontenancé:
- Vous détestez le thé?? Si vous voulez, vous pouvez le laisser infuser très peu au début. Mais vous ne le mélangez à rien d’autre! Regardez…

Il m’a montré sa tasse, dans laquelle macéraient quelques vermicelles verdâtres et feuillus.
J’ai pris un air intéressé, ai murmuré vaguement une approbation résignée.

- Très bien! Vous en buvez deux litres par jour et vous verrez que ça va très vite aider.
- Deux litres?? Je vais commencer par essayer une tasse!

Il m’a jeté un regard navré:
- Une tasse et puis deux, et puis trois et puis deux litres. Il faut vous forcer.

Lorsque j’ai retrouvé Celui qui m’accompagne, intrigué de connaître les résultats de cette première visite, je lui ai expliqué mon pensum.
- Bon, et bien je vais en boire avec toi pour t’encourager.
- Tu sais, il en faudra plus que cela pour y arriver…

Nous avons fait l’acquisition d’une boîte à thé alléchante à souhait, d’une pince-passoire à infusion et… nous avons essayé.
D’entrée, Il a aimé, lui qui est curieux des parfums et des saveurs des différents thés et autres tisanes et infusions, en boit beaucoup.
De mon côté, j’ai bu ma tasse, en réprimant une grimace.
Depuis, j’ai progressé, sous les encouragements de mon fan club dont l’unique membre poursuit sa mission de soutien.
J’en suis à trois tasses dans les bons jours.
Il va falloir que je retourne voir l’acupuncteur.
Je ne suis pas certaine qu’il sera satisfait de mes laborieux efforts.
Mais je vais quand même essayer de négocier la présence d’une feuille de menthe dans sa mixture.
Parce que franchement…. je ne serai jamais Roger Moore.

Martine Bernier

« Rien à déclarer »

7 février, 2011

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Salle presque comble hier soir pour le dernier film de Dany Boon, « Rien à déclarer ».
Une fois encore, certaines critiques ont été lapidaires.
Après le succès de « Bienvenue chez les Ch’tis », il faut croire qu’il était attendu au tournant…
Difficile, sans doute, d’oser un deuxième film après un triomphe aussi phénoménal.
Il était inévitable que l’on compare.
Alors?
Alors… voyons, que dire.
Dans la salle, le public était acquis d’entrée.
Il était venu pour s’amuser, et il s’est amusé.
La moindre réplique déclenchait les rires.
La soirée a été joyeuse, très joyeuse.

J’avoue aimer toujours autant Dany Boon et Benoît Poelvoorde.
La brochette d’acteurs qui les entoure est excellente aussi, avec une mention spéciale pour Bruno Lochet qui, dans son rôle de passeur de drogue est assez irrésistible.
Certaines scènes sont très drôles (beaucoup se retrouvent d’ailleurs dans la bande-annonce).
Mais alors, me direz-vous pourquoi ne se laisse-t-on pas « embarquer » comme ce fut le cas pour les Ch’tis?
Chacun aura son avis sur la question.
Pour ma part, j’ai trouvé que ce deuxième film n’était pas habité par la tendresse du premier, si caractéristique à la personnalité de Dany Boon.
Le personnage de douanier francophobe interprété pourtant avec brio par Benoît Poelvoorde est par moments presque effrayant dans sa haine du Français.
Le film reste une bonne comédie et ne démérite pas.
Si « Rien à déclarer » était sorti avant les Ch’tis, il aurait sans doute déclenché un torrent de louanges.
Mais il est le cadet… et la comparaison avec l’aîné est lourde.
Ce qui n’a pas empêché le public de se rendre au rendez-vous en masse et de ne pas bouder son plaisir.
Moi non plus.

Martine Bernier

Le courage

6 février, 2011

Lorsque l’on a eu le malheur, une fois dans sa vie, d’aimer une personne malhonnête, on devient méfiant.
Méfiante, en ce qui me concerne.
Seule façon de restaurer un semblant de confiance: découvrir l’Autre au quotidien.
Cette semaine a été pour moi très édifiante en ce sens.

Le courage ne se niche pas uniquement dans les actes héroïques que l’on peut imaginer.
Il est aussi impressionnant lorsqu’une situation demande de rester debout, ferme, fort, de prendre un coup sans faiblir pour autant.
J’ai vu Celui qui m’accompagne réagir de cette façon, prendre une tempête de plein fouet, et rester droit, juste.
Je l’ai vu en souffrir, mais tenir bon.
Le week-end est arrivé comme un îlot au milieu d’une mer en colère.
La mer s’est calmée.
Et moi, j’ai réalisé que cet homme qui vit sous mes étoiles et qui traverse les épreuves avec une telle droiture, est réellement un homme bien.
La confiance revient.

Martine Bernier

Palaces pour oiseaux

5 février, 2011

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Il aime les oiseaux, le canadien John Looser.
A 46 ans, il a arrêté son métier de charpentier.
Et, dans sa ville de Toronto, il a commencé à créer des maisons très particulières, alliant ses deux passions: le bois et les oiseaux, donc.
Ce charpentier créatif et doué a réalisé des abris pour nos compagnons emplumés bien différents de ceux que l’on trouve d’habitude.
De véritables châteaux, inspirés de l’architecture victorienne et européennes.
Ces demeures peuvent accueillir près de 103 sortes d’oiseaux différents, nous dit-on.
Le résultat a, semble-il, autant de succès auprès des humains que des volatiles.
Même si je me demande si les oiseaux ont la même notion du beau que nous…

Martine Bernier

La mémoire défaillante

4 février, 2011

L’IRM venait d’être terminée, j’attendais dans la salle d’attente le CD avec les clichés à remettre à l’un de mes médecins.
Une dame est arrivée avec un monsieur âgé, sortant du cabinet de l’un des médecins.
Elle l’a installé non loin de moi, a regardé autour d’elle et s’est adressée à moi:
- Excusez-moi, je dois aller à l’administration pour remplir un papier avant de partir, puis-je vous demander de jeter un oeil sur mon mari?
- Heu?
- Il a des problèmes de mémoire, a de la peine à se déplacer et est vite désorienté. Si je le laisse seul, il va me chercher partout. Mais il est calme. Je vais faire vite, j’en ai pour cinq minutes.
- D’accord.
- Merci!

Elle s’est penchée sur son mari:
- Je reviens tout de suite. Tu vois, Madame va rester près de toi. Ne t’en fais pas. J’en ai pour deux minutes.

Il ne l’a pas regardée s’éloigner, plongé qu’il était dans la contemplation de mon attelle.
Il a levé la tête, m’a jeté un regard interrogateur.
Je lui ai souri
Il m’a demandé:

- Vous êtes infirmière? Où est le médecin?
- Non, Monsieur, je ne suis pas infirmière. Le docteur est dans son bureau, juste à côté.
- Où est ma femme?
- Elle va revenir dans un instant, elle est allée remplir un papier.
- Ah.

Quelques secondes plus tard, il me regarde à nouveau:
- Infirmière, où est le docteur?
- Je ne suis pas infirmière, Monsieur. Le docteur est là, vous voyez? Dans la pièce en face.
- Ma femme est partie, je ne la trouve plus. Vous savez où elle est?
- Oui, elle est partie remplir un document au bureau. Elle va revenir dans une minute, ne vous en faites pas. Vous voulez un magazine?
- Oui, merci.

Je lui tends un hebdo dans lequel il fait mine de se plonger durant… trente secondes.
- Vous êtes infirmière?
- Non, Monsieur, je suis juste venue passer un examen.
- Vous avez vu, on attend depuis des heures, je ne sais pas où est ce docteur.
- Vous savez, cela ne fait pas très longtemps que vous êtes arrivé… Le docteur est là, dans son bureau. Il est occupé avec une personne, mais il ne tardera pas.
- Ma femme n’est pas là… Elle part tout le temps.
ll regarde autour de lui, inquiet.
J’essaie de le rassurer:
- Elle vient juste de s’absenter pour quelques minutes, mais elle va revenir très vite. Est-ce que vous aimeriez un verre d’eau?
- Oui, merci.

Je me lève, lui sers un verre d’eau et le lui tend.
Il le prend, le regarde, y trempe les lèvres, le pose sur la table et me regarde:
- Vous n’êtes pas en blanc. Les infirmières sont en blanc. Où est votre blouse?
- Je ne suis pas infirmière… je suis comme vous, en visite.

Durant une dizaine de minutes, le dialogue se prolonge, toujours à peu près identique.
Dès qu’il réalise que sa femme est absente, il s’angoisse, demande où elle est, où se trouve le docteur, me pose des questions sur mon « métier d’infirmière ».
Il a de grands yeux noisettes.
Des yeux d’enfant perdu.
Un enfant de passé 70 ans.
Il est grand, sec, un peu chauve, élégant.
Il a dû perdre du poids: il semble flotter dans son imperméable et dans ses vêtements.
Ses grandes mains aux doigts fins n’arrêtent pas de bouger.
Ses ongles sont parfaitement manucurés, ses rares cheveux bien coiffés, il sent bon l’eau de toilette.
Sa femme prend soin de lui…
Il s’accroche à son siège, touche les objets, regarde autour de lui comme s’il ne savait absolument pas où il est.
Qui était-il avant que sa mémoire ne s’en aille?

Quand enfin sa femme revient, elle me demande:
- Il n’a pas été trop difficile?
- Non, non, juste inquiet.
- Oui, c’est un vrai problème… Merci beaucoup en tout cas. Vous savez… il était médecin.

Elle s’adresse à son mari, l’aide à se lever doucement:
- Viens, nous rentrons à la maison.
Il s’est appuyé sur elle et, tandis qu’elle lui nouait son écharpe, m’a jeté un coup d’oeil, a eu un demi sourire et a dit:
- Elle est bien cette infirmière.

Martine Bernier

Les coquilles célèbres

3 février, 2011

On reproche souvent aux journaux et aux magazines les « coquilles » en tout genre.
Il suffit parfois d’inverser une lettre pour que le sens de toute une phrase soit totalement contrarié.
Certains exemples sont très connus…

- Jérôme Bonaparte, frère de Napoléon, était déjà atteint par la maladie qui allait l’emporter lorsque La Patrie » titra: « Une légère amélioration s’est manifestée dans l’état du prince. »
Le souci… ce fut le titre du lendemain: « Le vieux persiste. »
On imagine la consternation au journal qui, le lendemain, faisait paraître un rectificatif: « Le mieux persiste ».
L’histoire raconte que le compositeur responsable a été licencié.

- Dans un missel de son diocèse imprimé par un libraire de Dijon figuraient des indications sur les gestes du curé qui officiait.
Et là, l’horreur… un « u » a remplacé le « a » d’origine.
Pas grave, direz-vous?
Oh que si…
Surtout lorsque la phrase parue dit ceci: « Ici, le prêtre ôte sa culotte »…

- On dit que la guerre entre Alexandre Ier, empereur de Russie et Napoléon avait été en partie déclenchée, en 1812, par la suppression de trois lettres d’un mot.
Le Journal de l’Empire avait imprimé cette phrase: « L’un des empereurs dominera l’Europe »
Alors que le rédacteur avait écrit: non pas l’un mais l’union des empereurs…

- Monsieur Lorilleux a dû se faire taquiner longtemps après qu’une annonce soit sortie pour promouvoir ses usines d’encre.
Je ne pense pas qu’il avait prévu le texte diffusé: « Ces excellents produits sortent des urines de M. Lorilleux… »

- Même le dictionnaire n’est pas à l’abri des coquilles.
Dans un ouvrage mis en vente, on pouvait lire la définition suivante: « Ampithéâtre n.m.: Enceinte circulaire garnie de gredins. »

- L’humaniste Erasme a souffert lui aussi d’une erreur énorme.
Il avait dédié son ouvrage Vidua christiana (La Veuve chrétienne) à Marie, reine de Hongrie et soeur de Charles Quint.
Et il avait écrit, à son sujet: Mente illa usam eam semper fuisse, quae talem fminam decerte.
Traduction: « Elle fit toujours usage de l’esprit comme il convenait à une telle femme ».
A l’impression, malheureusement, Mente illa est devenu Mentula.
Ce qui donnait: « Elle fit toujours usage du pénis… »
Un peu gênant… d’autant que, avant que l’erreur ne fut décelée, 1000 exemplaires avaient été distribués…

Martine Bernier

L’hôpital

2 février, 2011

- Il y a des chances pour que vous ayez une chose que l’on voit très rarement et qui nécessite une opération. Je vous envoie à Lausanne pour une radio particulière.

Assommée.

- Vous avez dit chance?? Et bien… Cela dit, je suis convaincue que vous vous trompez.
- Pourquoi?
- Parce que j’aurais plus mal que cela si c’était le cas.
- J’espère me tromper, mais je pense que non. Et je crois que vous avez une relation très particulière avec la douleur…
- Mais pas à ce point! En arrivant ce matin, j’étais sûre que vous me diriez que tout allait bien et que j’allais pouvoir me passer d’attelle et de béquilles. Alors là, vous comprenez…

S’ensuit toute une explication m’entretenant du fait que les problèmes de tendons et de muscles sont étroitement liés au problème de santé qui est le mien.
Que je vais devoir faire un pas de plus dans l’encadrement médical.
Que… que… que…

Un instant plus tôt, dans la salle d’attente bondée, une personne m’avait reconnue et avait engagé la conversation.
J’avais répondu à ses questions et à celles d’autres personnes que mon métier et mes activités semblaient intéresser.
Dix minutes plus tard, face au médecin, aux examens et aux nouvelles qui m’arrivent, je redeviens comme tout le monde.
C’est-à-dire pas grand-chose.
N’empêche: je suis toujours convaincue que cette fois, ils se trompent!
Non mais!

Martine Bernier

Des animaux en prison

1 février, 2011

A la maison d’arrêt de Strasbourg, nous disait l’Express voici quelques semaines, les détenus ont le droit de s’occuper des pensionnaires d’une animalerie.
Une heure chaque jour, ils peuvent aller nourrir et s’occuper de leurs furet, chinchilla, lapins, hamsters, cochons d’Inde et autres colombes.
Prisonniers comme eux.
Les détenus avouent que ce sont des moments privilégiés, pour eux.
Leurs animaux leur permettent de s’évader…
Les responsables de la prison sont satisfaits de cette expérience, unique en France.
La zoothérapie apportait jusqu’ici un bien-être aux malades, aux personnes handicapées.
Désormais, les animaux vont apaiser le quotidien des détenus.
Ceux qui bénéficient de ce droit doivent en contrepartie travailler durant dix jours par mois au nettoyage des parties commune de la prison, et renverser 25 euros, soit la moitié de leur paye mensuelle, pour l’entretien de leur animal.
Des boules de poils ou de plumes pour adoucir l’enfermement et préparer la réinsertion en douceur… l’idée est belle.

Martine Bernier

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