Dimanche, Ecriplume a franchi le cap des 13’000 visites.
C’est assez sidérant, touchant, réconfortant…
Merci…
Pour franchir ce cap, je vous propose l’une des histoires les plus mystérieuses qui soit. Dont le secret pourrait enfin être révélé dans les mois à venir.
Tout commence au début du 16e siècle. L’un des hommes les plus puissants de Florence, Pier Soderini commande à Léonard de Vinci une oeuvre gigantesque de 17 mètres sur 7.
Elle devra rendre hommage à la République qui vient de faire fuir les Médicis, et sera placée dans le Palazzo Vecchio, palais du gouvernement, dans la salle du Conseil appelée « La Salle des Cinq-Cents » en référence au nombre d’élus qui y siègent.
En 1503, donc, le grand Léonard signe le contrat. Et il commence à préparer le carton de sa fresque.Carton dont on a aujourd’hui perdu la trace.
Il y travaillera pendant un an avec cinq de ses assistants.
Soderini s’impatiente. Il trouve que de Vinci met vraiment trop de temps à réaliser son oeuvre.
Mais ce dernier doit faire face à deux gros problèmes techniques: l’enduit humide l’oblige à peindre le plus vite possible avant que la couche supérieur ne sèche. De plus, seuls quelques pigments minéraux sont compatibles avec les enduits de cette époque. Or, Léonard désire utiliser toute la gamme de couleurs de sa palette… Il expérimente donc pour la première fois la cire d’abeille ainsi que de la résine grecque. Mais même ainsi, les couleurs ne sèchent pas. Vers les plafonds, elles coulent et se diluent. Et lorsqu’il fait trop chaud, la cire fond.
Un crève-coeur artistique pour le génie qui, usé par les intrigues de la Cour de Florence, décide de quitter la ville pour partir à Milan, puis en France.
Il abandonne sa fresque appelée « La bataille d’Anghiari ».
Celle-ci n’est pas aussi grande qu’elle devait l’être à l’origine, mais elle est considérée comme un chef-d’oeuvre par tous ceux qui l’ont vue à l’époque.
Je dis bien « à l’époque »… car depuis, elle a disparu.
Si des copistes nous permettent d’avoir une vague idée de ce que fut l’oeuvre en question, son destin a fait d’elle un mystère.
A Florence, les choses se gâtent pour Soderini qui doit abandonner la ville. Les Médicis reviennent en force et reprennent le pouvoir.
Et la salle des Cinq-Cents est transformée en écurie, après que l’oeuvre du peintre ait été recouverte d’un coffrage de bois.
Plusieurs années plus tard, Côme Ier, duc de Florence et grand-duc de Toscane, s’installe à son tour au palais.
Il rend à la salle son faste premier et commande six fresques au peintre et architecte Giorgio Vasari, à la gloire, cette fois, des Médicis.
Et c’est là que le mystère commence.
Personne ne sait ce qu’a fait Vasari. A-t-il sacrifié l’oeuvre de Léonard de Vinci? Ou l’a-t-il dissimulée?
Les spécialistes actuels relèvent que, par le passé, Vasari avait déjà dû remplacer une fresque peinte par Masaccio. Mais il ne l’avait pas détruite: il avait construit un mur devant elle pour la préserver…
Des indices prouvent qu’il était un admirateur du grand Léonard.
Et, en face du mur où avait été peinte « La bataille d’Anghiari », il a réalisé lui-même une autre fresque épique, comme cela lui a été demandé.
Fresque sur laquelle se trouvent deux mots énigmatiques tracés sur la bannière d’un soldat: « Cerca Trova ».
« Cherche et trouve »…
Est-ce un message laissé aux générations futures pour indiquer qu’il existe une piste pour retrouver l’oeuvre perdue du Maître?
Pendant des siècles, personne ne s’en est préoccupé. Jusqu’en 1975 où un vieux professeur d’Histoire de l’Art a rencontré un jeune ingénieur médical, Maurizio Seracini.
Il lui a demandé de faire des recherches et de prouver que la fresque de Léonard de Vinci existe toujours.
Cette quête est devenue primordiale pour l’ingénieur.
Il a utilisé toutes ses compétences, toutes les machines possibles et imaginables pour analyser, étudier, scanner et passer au crible des technologies les plus affûtées ce mur porteur du secret.
Il a encore fallu patienter 35 ans pour qu’il reçoive toutes les autorisations nécessaires et les fonds permettant de vérifier si l’hypothèse émise est crédible.
Aujourd’hui, il est à pied d’oeuvre.
Le 16 octobre dernier, le maire de Florence l’a autorisé à tenter une dernière phase exploratoire. « Un bombardement de neutrons et de rayons gamma permettra d’identifier les substances organiques et chimiques qui se trouvent derrière le mur de la salle des Cinq-Cents ».
A partir de ces résultats, une carte chimique sera dressée. Et l’énigme du mur sera enfin révélée…
Avec toute la délicatesse et la rigueur exigée pour une tâche aussi osée (le site est quasi sacré, au même titre que Versailles, à Florence), Seracini va travailler. Il lui faudra encore entre un et deux ans de recherche pour atteindre son but.
Et tout le monde rêve de l’instant où, lorsque la peinture de Vasari aura été soigneusement ôtée et que l’on aura retiré un bout du mur Est de la salle, le rayon d’une lampe torche éclairera peut-être une oeuvre inconnue du plus grand Maître de la Renaissance.
Pour le monde, ce serait une découverte inestimable.
Un « de Vinci » ramené à la lumière pour la première fois depuis des siècles.
A moins que tout cela n’ait été qu’un faux espoir…
Martine Bernier