Le temps ne fait rien à l’affaire…. Une droite gauche…
En ces temps un peu agités, il y a un exercice que j’aime particulièrement. On se pose et on regarde le chemin parcouru. Que reste-t-il des traces dans la neige de notre vie?
Je ne vais pas vous ennuyer en remontant aux calanques. J’ai eu une pensée pour mes grand-mères, femmes simples qui ont connu deux guerres, qui se sont battues chacune à leur manière. Que me diraient-elles aujourd’hui ?
A la fin de la guerre, notre pays était en ruine. Les zones d’influence changeaient. Les blocs Ouest et Est apparaissaient… Bizarrement, mes grands-mères étaient heureuses, la période noire était terminée. On retrouvait à manger, on avait de nouveaux droits, le droit de vote des femmes, la sécurité sociale, la retraite à 65 ans quand l’espérance de vie était de 70 ans au mieux.
On découvrait l’électricité, l’automobile, le travail était rude mais les conditions s’amélioraient. Il fallait se battre contre certains conservatismes, religieux, sociaux…
Après le retour du Général, on a vu la mise en place de la Quatrième République, la lutte pour que notre pays ne soit pas aux mains des « rouges ». Donc on lâchait, on donnait l’exclusivité des déchargements aux dockers, l’Etat nationalisait pour contrôler tout ça et le parti communiste s’empressait de noyauter les entreprises avec des syndicats.
Nous avions une droite dure conservatrice et une gauche réformiste progressiste.
Puis arrive la télévision, contrôlée par l’Etat, les premières radios libres, RTL et Europe 1. Les jeunes s’engouffrent dans ces nouveaux moyens d’évasion.
La politique évolue, le retour de de Gaulle, la décolonisation, l’accueil des émigrés de la « première génération » (pour moi ce sont plutôt les Italiens et les Polonais du nord…) qu’on accepte du bout des doigts. La jeunesse s’instruit, devient critique. Les distances se réduisent, on voit les longs courriers, l’électrification des trains, la démocratisation de l’automobile, l’avancée de la médecine… Et pour piloter tout ça un homme né au XIXème qu’on sent, même si personne n’ose le dire, dépassé par les événements.
Puis mai 68, qui a été déclenché par un souci de mixité dans un dortoir de fac…le premier homme sur la lune. A ce propos, ça me rappelle un mot de ma grand-mère belge, en voyant ça elle me dit : « tu te rends compte, ma grand-mère a vu passer Napoléon et moi je vois un homme marcher sur la lune…en si peu de temps deux événements pareils ! »
La vie continue, toujours s’améliorant, même si nous râlons, on ne serait pas français autrement. Arrive un des plus jeunes présidents français, Giscard qui commence à vouloir moderniser la France se rendant compte que le pays évolue plus vite que les politiques (il suffit de voir le combat de Simone Veil pour l’avortement. Le monde avance plus vite que nos politiques mais personne ne veut vraiment le voir.
Puis arrive, enfin pour certains, et hélas pour d’autres, Mitterrand ! 50 ans qu’il attendait ça !
J’ai revu, il y a quelques jours, le «Sacre». La montée de la rue Soufflot… Mitterrand seul avec sa Cour derrière, allant modestement déposer une rose aux Grands Hommes, semblant dire, maintenant je suis des vôtres…
Son début de règne a été un coup de pied magistral. L’abolition de la peine de mort, libéralisation des médias, de grandes avancées sociales. La droite conservatrice crie au scandale ! La gauche réformatrice avance.
Ces années ont marqué un changement profond. Depuis 40 ans, nous vivions à crédit en repoussant tout cela sur les générations futures. Là nous accentuons le phénomène. Nos industries ne sont plus rentables et partent. Notre système de distribution tire la France vers le bas (vendre moins cher que moins cher, c’est bien, mais comment paie-t-on les salariés, les fournisseurs…), notre éducation se «démocratise». En clair, les diplômes ont de moins en moins de valeur puisque sélection et travail deviennent des mots grossiers.
L’information va plus vite, les distances se réduisent, nous vivons de plus en plus vieux, mais on ne touche pas aux acquis, nous ne les remettons pas en question. Laissons cela à nos enfants !
Cette période est fabuleuse à voir du petit bout de la lorgnette… Nos réformateurs, nos forces de progrès s’embourgeoisent sans se rendre compte du séisme que c’est en train de provoquer. Un retour de balancier qui s’annonce violent.
La période Chirac ne change pas grand-chose, nous sommes encore avec des hommes et des femmes énarques d’après guerre, on croirait voir les généraux français en 1870 ne comprenant pas que leurs professeurs napoléoniens n’ont pas vu le monde changer.
Notre monde va vite peut être trop… L’argent se gagne et se perd en quelques secondes…
La gauche maladroite.
Aujourd’hui je suis surpris de voir le fatalisme ambiant. Nous vivons dans des conditions que nous n’avons jamais connues, du point de vue social, santé. Bien sur, nous traversons une crise économique, c’est le moment ou jamais de nous rassembler pour en sortir plus forts.
L’information et les médias ont remplacé la critique construite. Je suis frappé de voir le manque de travail de certains journalistes qui laissent les auditeurs faire leur travail, ne corrigent pas leurs interlocuteurs quand ils sortent des énormités et le bon peuple gobe tout ça en appuyant sur les touches de son téléphone plutôt que de participer à la vie sociale.
La course à l’apparence, à l’audimat a pris le dessus sur un dialogue de fond.
Le plus frappant c’est le changement profond de notre société qu’on semble découvrir maintenant. Une gauche conservatrice contre une droite réformatrice. Voir les députés socialistes se mettre dans l’angle d’une caméra de télévision pour chanter la Marseille !! Jaurès doit faire des loopings dans sa tombe.
Et aujourd’hui, on bloque le pays pour augmenter notre pouvoir d’achat. Il est difficile d’être contre, tout le monde veut gagner à plus. A condition que ce soit l’autre qui fasse l’effort.
Je me demande ce que penseraient mes grand-mères aujourd’hui. Elles seraient sans doute perdues devant des réformes d’un président omniprésent qu’on critique (on disait bien l’inverse de son prédécesseur) et devant une opposition qui n’a comme programme que d’être contre.
Ma grand-mère bretonne conclurait sûrement avec sa philosophie de bon sens, « le monde va continuer de tourner, tant qu’on a à manger tu sais, le reste… »
Alain