Archive pour la catégorie 'Textes Alain Amouriq'

Martine en Bretagne, les premiers pas

6 mai, 2009

Aujourd’hui c’est mon tour d’être seul à Saint Molf,  Martine devant faire un aller-retour helvète.

Je suis donc sorti avec Scotty pour aller chercher la poubelle (voir épisodes précédents).

Je comprends un peu mieux certains coups de blues et je me noie dans le travail.

Je repense à ce que nous avons vécu depuis quelques semaines et ce qu’il nous reste encore à vivre, deux étapes difficiles.

Je pense à Martine, cette Belgo-helvète qui a atterri, telle une extra européenne dans le bout de l’allée. Ses interrogations, ses surprises, sa régression verbale profonde vers un retour aux origines. Les « m’enfin », les « c’est comme ça chez vous ?? » et le pompon avec le « m’enfin, dis ?! » quand vraiment le choc culturel est fort.

Je pense à nos charmants voisins et à leurs adorables enfants. Ils ont été d’un accueil touchant et parfait (sachant qu’ils lisent le Blog, j’en profite un peu pour préparer une tournée d’apéro).

Martine avait voulu les remercier en les accueillant chez nous autour d’un buffet dinâtoire à la suisse. Je vous la fais courte, on couvre une table de plats et les convives se lèvent pour remplir leurs assiettes. L’idée était bonne mais j’ai émis une réserve culturelle, le Français quand il est à table est inamovible, à la limite il lève le coude dans un effort ultime pour atteindre une source de boisson ou une tranche de saucisson mais guère plus.

J’en fais part à ma chère et tendre, qui a ceci de commun et d’universel avec la gente féminine, elle est têtue…

Donc, nos voisins arrivent, nous apprenons à nous connaître, assez vite on voit un mouvement féminin de regroupement piplétaire, tandis que nous les hommes, nous pouvons nous parler avec une table qui nous sépare.

Martine explique le principe du buffet suisse, elle est écoutée religieusement, mais pas de réaction. Quelques minutes plus tard, elle recommence sans plus de succès. Le choc des cultures je vous dis ! Donc mise en place du plan B, translation des plats de la table de la salle à manger à celle du salon, au grand soulagement de nos amis.

« M’enfin, vous ne faites jamais comme ça chez vous ? dis ? » me demande Martine du regard

Nous finissons la soirée de manière agréable sous des regards étonnés et des tentatives de questions indiscrètes sur ce couple bizarre qui est venu poser ses valises au bout d’une allée de marronniers.

Dans les prochains épisodes, je vous raconterai les nouvelles aventures de Martine à la banque (m’enfin ?? dis dis dis !), au supermarché, à la poste, et la plus belle de toute, Martine en chef de meute d’une petite bande d’enfants.

Alain.

(approved and corrected and censored by MB ! M’enfin, dis !)

Y a-t-il une vie après la mort ?

1 mai, 2009

Il y des moments difficiles dans la vie… Le week-end dernier j’en ai vécu un.

J’ai perdu un ami et un collègue…

Nous avons des métiers particuliers, nous vivons vite, trop vite. Nous changeons de lieu de vie fréquemment avec femme et enfants. Cela développe à la fois une ouverture d’esprit et une certaine méfiance d’avoir été souvent trahi en amitié.

Il venait d’arriver depuis quelques mois dans la région avec sa femme et ses deux fils. Sa générosité et sa bonne humeur l’ont fait tout de suite accepter de l’entourage de son nouveau lieu de vie. On peut dire qu’il était un bon vivant, ça fait bizarre d’employer le passé pour dire bon vivant !

Elle m’a appelé, en pleurs. Il venait de faire un malaise, le SAMU l’emmenait à l’hôpital, elle était perdue. Je suis arrivé le plus vite possible, il a fallu gérer la garde des enfants et l’emmener, elle était incapable de conduire.

Nous sommes arrivés dans cette ruche blanche, un peu comme des zombies, ne sachant pas bien où aller. Renseignements, urgences ? Soins intensifs ? Un vrai labyrinthe.

Arrive enfin un médecin, la mine grave, qui explique. Il a fait un AVC grave. Il est en état de mort cérébrale. Un monde s’écroule en quelques minutes. Je la vois, perdue, trop d’émotions en peu de temps. Et puis vient un autre sujet, était il contre le don d’organe ?

Je sentais le médecin à la fois plein de compassion dans cette tâche difficile et en même temps pressé de la réponse. J’imagine les personnes attendant la vie en fonction d’un mot.

Nous en avions déjà parlé, comme on en parle parfois dans des sujets passionnés, politiques ou philosophiques. Nous en avions juste parlé, bien sûr que nous sommes tous pour le don d’organes mais ce ne sont restés que des paroles, sans nous rendre compte nous laissons égoïstement la décision à d’autres. Nous, on prendra une carte de donneur demain, on a le temps.

Elle aussi était d’accord, mais j’ai senti un énorme poids sur ces épaules, tout cela arrive trop vite, trop d’émotions, trop de questions.

Le médecin repose la question tranquillement, elle hoche la tête pour dire que non, il n’était pas contre mais elle voulait le voir avant les prélèvements.

Bon sang que ce moment a été dur… le voir respirer avec des machines bruyantes et se dire que c’est fini. Elle a été d’un courage fabuleux, l’a embrassé et a laissé les équipes médicales œuvrer. Il va peut être sauver 5 ou 6 personnes, son dernier acte de générosité à ce voyou.

J’ai attendu l’arrivée de la famille. Nous avons parlé de lui, d’elle, des enfants, des rires, des pleurs. Ses proches sont arrivés, le moment est venu de m’éclipser, de l’embrasser, de dire toutes les conneries qu’on peut dans ces moments de tristesse maladroite.

Je ne suis pas religieux pour un sou, mais là je peux dire qu’il y a une chance de vies après la mort.

Ne laissez pas cette décisions aux autres, croyez moi, ils n’ont pas besoin de cela en plus.

http://www.france-adot.org/

Alain.

La maison de Prévert (version Alain)

20 février, 2009

Il se mérite cet endroit. Au bout du Cotentin, un peu isolé, encore sauvage et calme.
On y arrive en se garant près de l’église. Un petit tour au cimetière, Prévert est là avec sa femme et sa fille, trois tombes identiques avec les lettres peintes en vert comme écrites avec un pinceau géant. Juste derrière, la tombe d’Alexandre Trauner, célèbre décorateur de cinéma, ami fidèle jusque là, au point de ne pas se séparer dans la mort. Une dernière magnifique preuve de fidélité et d’amitié.

Pour aller à la maison, il faut monter une petite route à pied. Nous avons pris notre temps, profitant du bruit de l’eau, des plantes bizarres, en nous demandant ce qui nous attend.
Enfin, un bruit de basse-cour, et à côté, au fond d’un jardin simple, cette petite bicoque.
M. Prévert est-il là ? Avec son éternel mégot au coin des lèvres, son imper et son chapeau mou ?
Non, bien sûr…Quel dommage.
Une jeune guide arrive, nous regarde avec un petit sourire. Voir un couple de jeunes amoureux qui l’attendent, elle a l’air surprise et amusée.
Elle ouvre les volets, puis les portes de la maison. Comme d’habitude nous laissons passer le « troupeau » des touristes pressés, vous savez ceux qui veulent tenir un planning, tout voir, vite.

Ils filent tous à droite, comme indiqué par la jeune guide, dans une salle où un film est projeté. Nous sommes des rebelles ! Donc nous allons à gauche où nous attend une exposition de dessins sur l’œuvre de Prévert. Un peu décevante cette maison, pour l’instant. J’ouvre la porte de l’arrière-cuisine, et nous tombons sur la statue du nain à cheval sur la tortue, un détail qui amuse Martine…
Vient l’étage, la seule pièce meublée, une grande table où Prévert faisait ces collages. Un fauteuil, un téléphone avec accroché au mur les numéros des proches, des gens à rappeler.
C’est la seule pièce où on peut sentir un peu le poète…bien maigre.

Nous sortons de la maison et prenons un sentier pour éviter la route. Nous longeons un ruisseau, nous sommes bien, un peu isolés du monde, un vrai couple de sauvages !

En retournant au parking je ne peux m’empêcher d’aller lui dire au-revoir au poète, à cet orfèvre des mots. Lui qui me mettait des musiques en têtes, le bruit de l’œuf sur le comptoir de zinc, Barbara, l’amiral…

La prochaine fois, si je reviens dans la région, je viendrai vous dire un petit bonjour Monsieur Prévert, j’ai compris que l’endroit que j’aime est auprès de vous et pas votre maison.

Alain

Histoire de France expliquée à Martine, épisode 2, le débarquement de Normandie.

19 février, 2009

Alors là, gros morceau. J’ai toujours adoré cette période de l’histoire. Peut être parce que certain membres de ma famille l’ont vécue, soit, comme la grande majorité des français en spectateurs apeurés, soit, comme d’autres beaucoup plus rares, dans une résistance qui les a menés dans des camps qui n’étaient pas vraiment de vacances et dont ils sont revenus dans un état proche de la fin. Mais c’est une autre histoire…

Revenons au débarquement. Donc, dans nos voyages, nous nous sommes retrouvés du côté de Caen. Petit détour par Pegasus Bridge et par un petit café à l’entrée du Pont. On peut voir « Première maison libérée de France « . Une toute petite maison qu’il faut imaginer le soir du 5 juin 1944, dans un secteur archi protégé. Et d’un coup une nuée de planeurs arrivent, chargés de soldats dont la mission est de tenir le pont. Ces braves gens se retrouvent en quelques secondes propriétaires d’un monument historique !

J’expliquais tout ça à Martine, nous entrons dans la maison, toute petite, couverte de photos de lettres illustres. Malheureusement la fille du propriétaire de l’époque n’est pas là. Cette dame a une prestance qui dénote avec la modestie des lieux, et elle sait maintenir le souvenir de cet endroit.

Quelques kilomètres plus loin, un autre lieu qui a surpris Martine, Sainte Mère l’Eglise.
Au clocher de ce village, pendouille un mannequin habillé en parachutiste américain.

Keksekessa ? Me disent les yeux de Martine (elle ne dirait jamais une chose pareille).

Hé bien, au débarquement, les alliés ont envoyés des milliers de parachutistes en avant-poste. Là encore, à l’époque c’était un peu du sport. Ils sautaient de nuit dans une zone qui avait été préalablement inondée par les Allemands. Nombreux de ces malheureux périrent noyés sous le poids de leur matériel sans combattre.
Pour préparer le terrain, des éclaireurs sautaient en premier pour baliser les zones d’atterrissage. Avec le vent, l’eau et le reste, ce balisage a été plus qu’approximatif.
Ce soir là, manque de chance, un incendie éclate au centre ville de Sainte Mère, les braves parachutistes sont parachutés et prennent la lueur d e l’incendie pour la balise. L’un d’entre eux atterrie sur le clocher de l’église et va assister à cet événement pendu en se faisant tirer dessus. En souvenir de cela, ce mannequin a été placé là.

Nous continuons notre balade, bien sur il y a les plages, le plus curieux est de trouver des monuments dressés là souvent par des troupes du Génie, la copie de la statue d’une place de Londres ou d’autres choses.

En remontant le long du Cotentin, j’ai eu l’idée de l’emmener visiter la maison de Prévert. Je lui laisse le plaisir d’en parler, je commenterai ensuite. J’adore Prévert et je dois confier sans dévoiler le sujet que le cimetière m’a plus touché que la maison.

Alain

Mon Histoire de France expliquée à Martine. 1. Napoléon

3 février, 2009

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Si vous saviez comme il est parfois difficile, dès le petit déjeuner, de répondre à une question intelligente sur un sujet compliqué…
Martine a souvent des questions intelligentes et je ne suis pas du matin !

Donc, un jour, débat passionné autour de Napoléon. Son avis : despote tyrannique qui a ruiné la France (caricature à peine).
Venant de finir pour la xième fois les mémoires de Constant, le premier valet de chambre de l’Empereur jusqu’en 1814, j’entre dans le sujet.

Comme d’habitude, j’aime planter le décor. Napoléon est né en 1769, sous Louis XV, fils de petits nobles corses. Il a grandit dans les écoles du Roi où on lui rappelait assez souvent son origine modeste. Il était l’un des meilleurs élèves de ces écoles en mathématiques. Il se préparait donc à une carrière dans l’armée et plus précisément dans l’artillerie vu que son rang ne permettait pas vraiment des armes plus prestigieuses.

La France de l’époque était un des pays d’Europe les plus peuplés, essentiellement rural, avec un système monarchique qui commençait à devenir obsolète, un pouvoir central relayé sur le terrain par des nobliots plus ou moins compétents.

Donc, arrive Louis XVI dont on connait la fin et la révolution.

Travaux pratiques, nous allons déjeuner à coté du Procope, café célèbre de Paris derrière la ruelle où habitait Marat et au bout de laquelle était le logement de Danton.
Je la laisse imaginer la foule dans cette ruelle demandant le changement et voulant tout détruire et couper les têtes qui dépassent, le propre des révoltions.

La révolution a tellement bien fonctionné que tout le système politique s’est écroulé. L’élite de la nation a, soit émigrée, soit a été raccourcie par l’invention du Docteur Guillotin.
Le pays était aux mains d’une poignée d’extrémistes dont l’ambition était de tout détruire pour un monde meilleur. Ils ont réussi la première partie, le souci c’est la deuxième.

Le monde entier était contre la France. La peur de voir cette révolte se propager ou le moyen de restaurer un ordre ancien.
Nos politiques avaient besoin de propagande, d’une icône et voilà notre Bonaparte, jeune, talentueux, victorieux en bataille et novice en politique. La nouvelle idole des jeunes !

Ce que n’avaient pas prévu les régnants de l’époque, c’est que le Bonaparte était bougrement intelligent, rêvait de prendre une revanche contre le système depuis Brienne et avait une ambition et des idées pour reconstruire le pays.

Ainsi (je la fais courte) il prit le pouvoir avec les méthodes propres au système de l’époque. Comprenant vite que le moyen de remettre de l’ordre dans le pays devait repasser par un état centralisateur. Il nomme des Préfets, écrit un code civil et met les bases d’un système juridique qui est encore en vigueur dans de nombreux pays aujourd’hui. Il créé l’institut, les lycées, le baccalauréat. Entreprend de grands travaux, des ports, des routes. Il pousse à la recherche (la betterave à sucre…), rétablit la religion, et recrée un système politique visible avec des cadres qu’il tient (ou presque) à coup de titres, crée la banque de France, j’en passe et des meilleures.

Bien sur, il y a le volet militaire… Là je vois l’œil de Martine qui s’assombrit. Donc direction les Invalides.
Il faut comprendre que la France est isolée dans un monde hostile, la création de l’Empire ayant un peu calmé les autres souverains mais ça n’a pas duré longtemps. L’Angleterre craignait pour sa suprématie maritime et ses colonies, les états de l’Est pour leurs souverainetés et le risque de contagion vers des monarchies constitutionnelles. Bref, pour des raisons différentes, toute l’Europe voulait détruire la France et son dirigeant.

Bien sûr, aujourd’hui on regarde le nombre de morts, la boucherie des batailles. Avec l’œil de l’époque, le peuple était fier de voir un pays qui redevenait fort, en conquête, avec une vision de l’avenir. Et cela permettait à l’Empereur de « placer » des membres de confiance dans ses conquêtes tout en mettant en place son système de gestion politique qui contrôlait tout ça.

Il a commis des erreurs, comment ne pas en commettre dans cette époque. Surtout qu’il est assez facile de juger avec quelques années de recul… Mais il a permis de reconstruire un pays qui était tombé dans des mains d’extrémistes et d’anarchistes de tous poils.

Nous arrivons aux Invalides. Comment un dictateur pourrait il être encore ainsi vénéré ?
Le tombeau est là dans sa crypte, entouré des noms de batailles et d’institutions, dans le prolongement, une niche abrite une dalle sous laquelle est son fils.

Il a été l’objet d’attaques et de dévotions bien après sa mort et il a même été un objet politique.

Le retour des cendres, en 1840, pas vraiment un hasard, dans un contexte politique qui recommençait à être agité. Cent ans plus tard, l’occupant allemand organise le retour des cendres de son fils, encore un geste politique.

Nous finissons ce cours d’histoire « à ma façon » sur un banc devant les Invalides. Je nargue un bus de touristes Belges qui débarquent au pas de charge, prennent une photo et vont sûrement filer vers Montmartre.

Nous sommes bien, seuls au monde au milieu de cette foule. Je ne suis pas sûr de l’avoir convaincue mais au moins j’espère lui avoir montré cette période sous un nouvel angle sans aucune prétention historique, tout étant une interprétation très personnelle.

Amis lecteurs, lisez les mémoires de Constant, vous verrez cet homme sous un autre angle !

Alain

Aragon : l’envers du décor

2 février, 2009

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Ça faisait des années que je passais devant ce panneau d’autoroute qui indiquait la maison d’Aragon et d’Elsa. J’ai proposé un jour à Martine que nous allions la visiter.

Je dois préciser, sans entrer dans les détails, que je ne suis pas un grand érudit. J’ai une vie et un métier prenant, cela m’a fait passer certaines priorités en les mettant de coté, ce que je regrette aujourd’hui.

Donc, aujourd’hui, ayant la chance de partager ma vie avec une érudite, j’essaie de me rattraper.
Nous voici devant un mur de clôture banal, rien n’indiquant ce qui pouvait bien se cacher derrière.

La porte s’ouvre sur une cour. Petite maison en « L » avec une cour pavée, un puits, un jardinet et deux bancs. A gauche s’ouvre un très grand parc.
Nous entrons et sommes accueillis cordialement, le miracle de la carte de presse.

Je sens tout de suite si Martine est bien ou pas, ça se voit à ses yeux apaisés ou paniqués. Là, elle était apaisée, bien, heureuse.
Un brave jeune homme nous sert de guide, j’avoue que j’ai un peu décroché de son laïus dont il était si fier. J’aime les gens qui vivent pas qui récitent.

Nous entrons dans la cuisine, surprenante, simple sauf si on regarde la vaisselle. Des Picasso en dessous de plats, assiettes etc.…
Ensuite vient le bureau du Maître, encombré de livres, d’affiches. Le bureau est dans un fouillis organisé. A croire qu’Aragon va jaillir d’une porte. Martine écoute le guide, essaie de le flatter un peu pour qu’il sorte de son discours.
La pièce principale, à droite une grande table de ferme pouvant accueillir au moins une dizaine de convives. Imaginez, Aragon, Elsa, Picasso, Breton et les autres ça a du fourmiller d’idées dans ce lieu.
Notre jeune guide parle du sale caractère d’Aragon. Dans cette pièce, il y a la roue à aube du moulin, enfermée dans une sorte de véranda. Quand ses hôtes n’étaient pas d’accord avec lui, le Maître mettait la roue en route si bien que le bruit masquait les conversations, une sorte ce censure…
En écoutant ça je trébuche dans les pieds d’un fauteuil. Ce pied est une corne de taureau du plus mauvais gout. Personne ne m’a vu, rien de cassé, ouf !!

Nous montons à l’étage, l’impression qu’ici commence l’univers d’Elsa. D’abord beaucoup de livre russes. Et puis ça se sent, je ne l’explique pas ça.
La cravate d’Aragon sur une bibliothèque, la chambre d’Elsa et son bureau dont la vue donnait sur le lieu où elle souhaitait reposer (la photo de l’article de Martine donne la vue inverse, de la tombe vers le bureau).
C’est d’une de ces fenêtres qu’Aragon a vu Elsa mourir sous ses yeux, tombant dans le petit jardinet. Un moment d’émotion. Voir ainsi l’amour de sa vie le quitter…

La salle de bain, avec un détail: un fauteuil bien confortable installé à coté de la baignoire ! Même dans son bain, elle ne pouvait être tranquille !

Et toujours cette impression forte que le petit guide n’est pas seul à nous accompagner dans cette visite.

Il nous laisse pour visiter le parc, espace dédié à une exposition d’art moderne qui me laisse un peu indifférent. Martine et moi montons vers la sépulture de nos hôtes. Un grand moment d’émotion, nous entendons le violoncelle, une pierre simple est là.
Nous nous regardons, nous remplissant de ce moment. On les envie ou pas ? Finalement non, nous, nous sommes immortels !

Alain

LE TEMPS NE FAIT RIEN A L’AFFAIRE

29 janvier, 2009

Le temps ne fait rien à l’affaire…. Une droite gauche…

En ces temps un peu agités, il y a un exercice que j’aime particulièrement. On se pose et on regarde le chemin parcouru. Que reste-t-il des traces dans la neige de notre vie?

Je ne vais pas vous ennuyer en remontant aux calanques. J’ai eu une pensée pour mes grand-mères, femmes simples qui ont connu deux guerres, qui se sont battues chacune à leur manière. Que me diraient-elles aujourd’hui ?

A la fin de la guerre, notre pays était en ruine. Les zones d’influence changeaient. Les blocs Ouest et Est apparaissaient… Bizarrement, mes grands-mères étaient heureuses, la période noire était terminée. On retrouvait à manger, on avait de nouveaux droits, le droit de vote des femmes, la sécurité sociale, la retraite à 65 ans quand l’espérance de vie était de 70 ans au mieux.
On découvrait l’électricité, l’automobile, le travail était rude mais les conditions s’amélioraient. Il fallait se battre contre certains conservatismes, religieux, sociaux…

Après le retour du Général, on a vu la mise en place de la Quatrième République, la lutte pour que notre pays ne soit pas aux mains des « rouges ». Donc on lâchait, on donnait l’exclusivité des déchargements aux dockers, l’Etat nationalisait pour contrôler tout ça et le parti communiste s’empressait de noyauter les entreprises avec des syndicats.
Nous avions une droite dure conservatrice et une gauche réformiste progressiste.

Puis arrive la télévision, contrôlée par l’Etat, les premières radios libres, RTL et Europe 1. Les jeunes s’engouffrent dans ces nouveaux moyens d’évasion.

La politique évolue, le retour de de Gaulle, la décolonisation, l’accueil des émigrés de la « première génération » (pour moi ce sont plutôt les Italiens et les Polonais du nord…) qu’on accepte du bout des doigts. La jeunesse s’instruit, devient critique. Les distances se réduisent, on voit les longs courriers, l’électrification des trains, la démocratisation de l’automobile, l’avancée de la médecine… Et pour piloter tout ça un homme né au XIXème qu’on sent, même si personne n’ose le dire, dépassé par les événements.

Puis mai 68, qui a été déclenché par un souci de mixité dans un dortoir de fac…le premier homme sur la lune. A ce propos, ça me rappelle un mot de ma grand-mère belge, en voyant ça elle me dit : « tu te rends compte, ma grand-mère a vu passer Napoléon et moi je vois un homme marcher sur la lune…en si peu de temps deux événements pareils ! »

La vie continue, toujours s’améliorant, même si nous râlons, on ne serait pas français autrement. Arrive un des plus jeunes présidents français, Giscard qui commence à vouloir moderniser la France se rendant compte que le pays évolue plus vite que les politiques (il suffit de voir le combat de Simone Veil pour l’avortement. Le monde avance plus vite que nos politiques mais personne ne veut vraiment le voir.

Puis arrive, enfin pour certains, et hélas pour d’autres, Mitterrand ! 50 ans qu’il attendait ça !

J’ai revu, il y a quelques jours, le «Sacre». La montée de la rue Soufflot… Mitterrand seul avec sa Cour derrière, allant modestement déposer une rose aux Grands Hommes, semblant dire, maintenant je suis des vôtres…
Son début de règne a été un coup de pied magistral. L’abolition de la peine de mort, libéralisation des médias, de grandes avancées sociales. La droite conservatrice crie au scandale ! La gauche réformatrice avance.

Ces années ont marqué un changement profond. Depuis 40 ans, nous vivions à crédit en repoussant tout cela sur les générations futures. Là nous accentuons le phénomène. Nos industries ne sont plus rentables et partent. Notre système de distribution tire la France vers le bas (vendre moins cher que moins cher, c’est bien, mais comment paie-t-on les salariés, les fournisseurs…), notre éducation se «démocratise». En clair, les diplômes ont de moins en moins de valeur puisque sélection et travail deviennent des mots grossiers.

L’information va plus vite, les distances se réduisent, nous vivons de plus en plus vieux, mais on ne touche pas aux acquis, nous ne les remettons pas en question. Laissons cela à nos enfants !

Cette période est fabuleuse à voir du petit bout de la lorgnette… Nos réformateurs, nos forces de progrès s’embourgeoisent sans se rendre compte du séisme que c’est en train de provoquer. Un retour de balancier qui s’annonce violent.

La période Chirac ne change pas grand-chose, nous sommes encore avec des hommes et des femmes énarques d’après guerre, on croirait voir les généraux français en 1870 ne comprenant pas que leurs professeurs napoléoniens n’ont pas vu le monde changer.

Notre monde va vite peut être trop… L’argent se gagne et se perd en quelques secondes…

La gauche maladroite.

Aujourd’hui je suis surpris de voir le fatalisme ambiant. Nous vivons dans des conditions que nous n’avons jamais connues, du point de vue social, santé. Bien sur, nous traversons une crise économique, c’est le moment ou jamais de nous rassembler pour en sortir plus forts.

L’information et les médias ont remplacé la critique construite. Je suis frappé de voir le manque de travail de certains journalistes qui laissent les auditeurs faire leur travail, ne corrigent pas leurs interlocuteurs quand ils sortent des énormités et le bon peuple gobe tout ça en appuyant sur les touches de son téléphone plutôt que de participer à la vie sociale.

La course à l’apparence, à l’audimat a pris le dessus sur un dialogue de fond.

Le plus frappant c’est le changement profond de notre société qu’on semble découvrir maintenant. Une gauche conservatrice contre une droite réformatrice. Voir les députés socialistes se mettre dans l’angle d’une caméra de télévision pour chanter la Marseille !! Jaurès doit faire des loopings dans sa tombe.

Et aujourd’hui, on bloque le pays pour augmenter notre pouvoir d’achat. Il est difficile d’être contre, tout le monde veut gagner à plus. A condition que ce soit l’autre qui fasse l’effort.

Je me demande ce que penseraient mes grand-mères aujourd’hui. Elles seraient sans doute perdues devant des réformes d’un président omniprésent qu’on critique (on disait bien l’inverse de son prédécesseur) et devant une opposition qui n’a comme programme que d’être contre.
Ma grand-mère bretonne conclurait sûrement avec sa philosophie de bon sens, « le monde va continuer de tourner, tant qu’on a à manger tu sais, le reste… »

Alain

L’envers du décor de l’interview de JP COFFE

26 janvier, 2009

Avec l’autorisation de Martine, je vous livre l’envers du décor de l’interview de Coffe….

On a tous rêvé de ça, un peu voyeurs, pouvoir rencontrer des personnalités. Martine me donne ce privilège.

Donc, nous nous sommes retrouvés devant RTL, bien en avance à attendre Mr Coffe qui nous avait donné rendez vous dans une de ses cantines parisiennes.

Pour l’événement, Martine avait demandé à un photographe de venir immortaliser la chose. Nous allons apprendre à nos dépends, que le bougre était à la photographie ce que M. Ripolin était à l’Impressionnisme.

Le bougre arrive, et nous dit aller installer son matériel dans le restaurant. Nous attendons sagement la fin de l’enregistrement des « Grosses Têtes » pour accueillir M. Coffe.

L’homme arrive, élégant avec une prestance naturelle et ses lunettes en hublot. Salutations d’usage et nous entrons dans la salle et … Horreur !! L’affreux nous avait fait un mini studio avec projecteurs et tout et tout. Coffe pique une colère contrôlée… Martine panique. Je calme tout le monde et demande à notre Picasso numérique de tout démonter. A l’ère du numérique être ainsi au bout du rouleau….

Nous arrivons à calmer notre hôte. Une fois à table, nouveau drame, il demande qui veut partager avec lui un verre de vin blanc. Martine ne boit pas, notre picturiste refuse également. Et là, je vois se poser sur moi deux regards de cockers tristes… Martine d’abord qui m’appelle au secours, se disant que son interview commence à être titaniquesque et ….JP Coffe semblant me dire « s’il te plaît… accepte! »

Nous trinquons donc avec chacun notre verre de Chablis et quelques tartines de rillettes.

JP Coffe nous fixe les règles du jeu, on mange d’abord et on fait l’interview et les photos ensuite et d’un geste auguste, il fait signe au patron de remettre une tournée de Chablis.

Et il commence à nous parler. Quel homme délicieux, d’une sensibilité, d’une tendresse loin des jetés de jambons de Canal +. Il nous parle de la bouffe dans les prisons, l’orphelinat qu’il parraine à Madagascar, son combat pour le pain de qualité, ses vacances pour les grand mères.

Et nous n’avons plus de Chablis !! Hop, sitôt dit, les verres sont à nouveau pleins.

Voici le moment de la commande. Coffe lance adroitement les suggestions vers le menu « chasseur ». Martine mange très peu, elle prend une entrée, notre photomatronche une assiette de jambon. Nouveau regard en ma direction, il semble me dire « ne me fais pas honte… » Donc je commande le menu chasseur.

Avec une bouteille de Bandol, précise-t-il au serveur !

Nous continuons notre discussion. Je suis toujours aussi surpris de cet homme, quelle richesse de coeur et d’âme. Et notre photographe commet une nouvelle bévue, il met de côté soigneusement le gras de son jambon.

Je suis au régime, précise-t-il.

Coffe et moi en choeur: « Mais tu es fou !! C’est le meilleur, tout le goût est là !! »

Nous nous regardons l’oeil qui commence à rire un peu.

Martine arrive à glisser quelques questions, les plats arrivent mais nous n’avons plus de Bandol !

Hop, une nouvelle bouteille, il me remplit mon verre avec un coup d’oeil sur le triste hère qui est à ses côtés.

Nous passons un moment de complicité merveilleux tout en simplicité un vrai bonheur.

Arrive le moment du reportage proprement dit. Martine voulait faire une surprise et avait amené de son Helvétie deux flacons de vins et quelques fromages.

Notre maniaque de l’instamatique nous fait le grand jeu… Il dégage la table des assiettes et des verres et se met à shooter, un vrai Zidane du reflex !!

Bon le souci, c’était de déguster des fromages avec les doigts et du vin à la bouteille maintenant.

J’arrive à récupérer deux verres, deux assiettes et un couteau.
Et M. Coffe reprend son rôle de professionnel, humant longuement le fromage, goûtant le vin, commentant, complimentant avec délicatesse. J’essaie de le suivre. Je plonge mon nez dans le verre et je suis un peu déçu, le vin suisse n’a pas beaucoup d’arômes… Il me faudra quelques longues minutes pour me rendre compte que je humais un verre d’eau. Les effets secondaires du Bandol !

Nouveau trait de caractère de JP Coffe, la générosité ! Il me fait signe et me dit en désignant le personnel et le patron du restaurant :

Fais leur goûter! partage ! Donne-leur un  morceau !

Il doit nous quitter, l’enregistrement de « Vivement Dimanche » l’attend.

Il nous invite…décidement, merci Monsieur.

Il prend son grand manteau son chapeau, nous fait un signe de la main et disparait…

Pendant que Martine fait le point avec le photographe qui a visiblement du mal à le faire aussi, je partage quelques moments avec le patron du restaurant.

Le dimanche suivant, je regarde Vivement Dimanche. Mr Coffe est là, très pro, calé dans le canapé avec parfois l’oeil perdu dans le lointain… Peut-être pense-t-il à un voyage entre Chablis, Bandol et la Suisse ??

Merci M. Coffe pour ce moment, un peu court mais quel régal…

 

Alain.

 

Creposuk

21 janvier, 2009

27 rue Galande, 75005 Paris
Tèl : 01 43 25 45 00

Tèl : 09 52 45 75 00

Lundi – Samedi
12h – 16h
19h – 02h
Dimanche 12h – 22h

 

Pour ceux qui aiment Kamal au Loubnane (voisin), allez dire bonjour à Matthieu chez Creposuk…

Il y a un air de ressemblance ? Matthieu est le rejeton de Kamal, et quel rejeton…

Un champion du Guiness Book ! (mais oui madame) et surtout un garçon d’une gentillesse et d’un sens de l’accueil rare.

On y va là aussi pour manger etc…. mais surtout pour le plaisir d’embrasser Matthieu !

Loubnane

21 janvier, 2009

 

Restaurant Loubnane

29, Rue Gallande

 75005 Paris

Tel : 01 43 26 70 60 – Fax : 01 43 26 07 60

Spécialités libanaises

Alors là….bien sur c’est bon, bien sur il y a des mézzés… Mais il y a surtout Kamal, Elie et le reste de l’équipe qui ont su créer et entretenir cette ambiance d’amis.

On y va pour s’embrasser, refaire le monde, prendre son temps, rire, parler fort, chuchoter des mots doux et manger un peu…

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